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Jean-Louis Murat › Charles et Léo

  • 2007 • V2 VVR1048802 • 2 CD

cd 1 • 12 titres • 35:35 min

  • 1Sépulture3:00
  • 2Avec ses vêtements (...)2:26
  • 3La fontaine de sang2:01
  • 4L'héautontimorouménos1:57
  • 5L'horloge3:44
  • 6Le guignon2:26
  • 7Madrigal triste3:43
  • 8La cloche fêlée3:05
  • 9L'examen de minuit3:23
  • 10Bien loin d'ici2:10
  • 11Je n'ai pas oublié (...)1:59
  • 12A une mendiante rousse5:41

dvd • 14 titres

  • 1Réversibilité
  • 2L'héautontimorouménos
  • 3Le guignon
  • 4L'examen de minuit
  • 5Bien loin d'ici
  • 6Avec ses vêtements (...)
  • 7Madrigal triste
  • 8L'horloge
  • 9Je n'ai pas oublié (...)
  • 10La cloche fêlée
  • 11La fontaine de sang
  • 12Sépulture
  • 13A une mendiante rousse
  • 14Petite [reprise de Léo Ferré]

informations

Produit par Jean-Louis Murat et Denis Clavaizolle. Enregistré par Aymeric Létoquart aux studios Davout et Scarlett. DVD filmé à La Coopérative de Mai par Arnaud le Goff.

Tous les textes sauf "Petite" sont signés Charles Baudelaire. Toutes les musiques sauf "Réversibilité" sont signées Léo Ferré.

line up

Jean-Louis Murat (chant, guitare, dobro, harmonica), Denis Clavaizolle (Rhodes, claviers, piano (DVD)), Morgane Imbeaud (chant 4, choeurs), Alain Bonnefont (choeurs), Christophe Pie (batterie 1, 12), Stéphane Mikaëlian (batterie 5)

chronique

  • poésies en chansons

Jean-Louis Murat a toujours entretenu avec les Grands Anciens de la chanson française des rapports ambivalents. Lui, le « Johnny Frenchman » colonisé par la culture anglo-saxonne, il n’a jamais témoigné autre chose qu’un lointain dédain pour les grandes figures tutélaires, indéboulonnables piliers d’une chanson héritière d’un patrimoine poétique trop lourd à porter. Ses modèles à lui ont toujours parlé en anglais, ont toujours vécu sur une ligne d’horizon plus vaste, celle de la frontière américaine. Ou alors, à la limite, se prête-t-il à un hommage à Joe Dassin (sa participation à la compilation « L’équipe à Jojo » en compagnie entre autre de Katerine, Pascal Comelade et Daniel Darc) ou reprend en sifflotant « Mon frère d’Angleterre » de Bourvil. Et voilà qu’il se trouve commissionné par les héritiers de Léo Ferré pour mettre en voix les poèmes de Baudelaire, sans doute la figure la plus mythique de la poésie hexagonale, sur les musiques du vieil anar. Deux monuments pour le prix d’un.

Le romantisme morbide du traducteur d’Edgar Poe, Murat s’en était déjà saisit à l’époque de Dolores, l’incroyable « Réversibilité » venait clore ce premier somment de l’oeuvre muratienne (c’est le moment ou jamais de sortir les grands mots). Peut-être comme pour renouer avec cette inspiration, autant qu’avec une fantastique poésie française, Murat rappelle son ancien compagnon Denis Clavaizolle, son double dans l’ombre avec qui il n’a plus vraiment travaillé en studio depuis. Pour les fans de la première époque, avant le power trio et les tentatives pop, c’est un ravissement de retrouver ces sonorités de Rhodes et de nappes synthétiques qui ont longtemps fait la signature de Murat. Malgré tout, et sans être plus que ça familier de l’oeuvre de Ferré, on reconnait bien sa façon de trousser des mélodies, dans lesquelles Murat se glisse tel un chat, sur la pointe des patounes, sans chercher à forcer une emphase qui lui est parfaitement étrangère. Le titre de l’album en dit d’ailleurs beaucoup, en les désignant par leurs prénoms, il leur ôte un peu de la figure du mythe, juste des compagnons de poésie et de chanson avec lesquels on irait bien partager quelques verres (d’absinthe, sans nul doute). La sensualité morbide de Baudelaire va bien sûr comme un gant au tempérament du Murat, qui s’est déjà frotté à une langue ancienne, le texte d’ « A une mendiante rousse » offrant des résonances évidentes avec celui de « Jeanne la rousse » de Pierre-Jean de Béranger.

Pour donner la touche finale à une approche musicale basée sur des atmosphères relativement ténues, la voix à la fois délicate et grave de Morgane Imbeaud, moitié du duo indie-folk clermontois Cocoon (signature du label de Clavaizolle), apporte un contrechamps féminin impeccable à la tessiture de Murat, notamment sur le duo de « L’héautontimorouménos » (le bourreau de soi-même, rien de moins), sommet de noirceur de l’album (le fameux spleen baudelairien) avec « Madrigal triste », sinistre réminiscence évoquant à nouveau « Dolores » et l’horrifique « Examen de minuit » aux claviers liturgiques. En contrepoint, l’ambiance presque dark-jazz lounge de « L’horloge » et l’ambient pop aérienne de « La cloché fêlée » apportent des respirations plus contemporaine, moins focalisée sur la mise en lumière de la grande poésie. Au final Murat réussit à faire sien un répertoire, avec un grand R, avec une humilité certaine, sans non plus chercher à se faire tout petit devant des artistes mythifiés jusqu’à la nausée. Preuve en est, comme un salut confraternel, à la fin du magnifique concert (sans public) enregistré à la Coopérative de Mai, tout en piano-voix, Murat glisse le « Petite » de Léo, en toute simplicité, d’un chanteur français à l’autre, d’un poète à l’autre, alors qu’il débutait son tour de chant par le fameux Réversibilité sur sa propre musique. Une façon de retour aux sources (autant les siennes que celles d’une culture dont il n’a jamais vraiment voulu faire partie) qui va infuser sur la suite.

note       Publiée le jeudi 15 avril 2021

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Oui oui j'avais bien compris que c'était de Léo, qui avait pour le moins le sens de la formule. "Le bonheur, ça se vole", un truc du genre. J'avoue que des Grands Anciens, j'ai été biberonné à Brassens et Brel mais très peu Léo, et donc je ne connais que très superficiellement (comme c'est dit dans la chro), ayant par ailleurs moi aussi un rapport ambivalent avec la chanson française (d'où je me suis trouvé bien chez le brenoï, peut-être).

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C'est Léo qui dit ça, c'est pour la formule, c'est pas à prendre au pied de lettre je pense, d'autant que lui même n'a pas fait que des choses tristes !

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Alors je m'inscrirais en faux, heureusement que l'art, c'est mille autres choses aussi. Sinon c'est de la complaisance. D'ailleurs chez Murat même si il y a beaucoup de tristesse et d'angoisse, il n'y a pas que ça heureusement. Mais ouais, quelle merveille en effet cet album ! Une rencontre (un peu improbable pour ce qui est des deux chanteurs) réussie. Intéressant de voir Clavaizolle aux manettes derrière celle-ci comme celle de Bashung avec (post-mortem) Gainsbourg également, le mec qu'on appelle pour les grandes causes perdues en somme.

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Quelle merveille ce disque, Murat/Baudelaire/Ferré ! Si beau et parfois si triste ! Et comme disait Léo: « L’art, c'est la tristesse… L’art, c'est triste. Le critère, c'est vraiment les larmes. »

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