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Pink Floyd › The Division Bell

cd • 11 titres • 66:21 min

  • 1Cluster One
  • 2What Do You Want From Me
  • 3Poles Apart
  • 4Marooned
  • 5A Great Day For Freedom
  • 6Wearing The Inside Out
  • 7Take It Back
  • 8Coming Back To Life
  • 9Keep Talking
  • 10Lost For Words
  • 11High Hopes

informations

line up

David Gilmour (chant, guitares, claviers, chœurs, talkbox, programmation, production), Nick Mason (batterie, percussions, carillon), Richard Wright (claviers, orgue, synthétiseurs, chant, chœurs)

Musiciens additionnels : Bob Ezrin (claviers, percussions, production), Stephen Hawking ("Keep Talking"), Michael Kamen (orchestration), Dick Parry (saxophone), Tim Renwick (guitares), Jon Carin (claviers, piano, programmation), Guy Pratt (basse), Gary Wallis (percussions), Sam Brown, Durga McBroom, Carol Kenyon, Jackie Sheridan, Rebecca Leigh-White (chœurs)

chronique

The Division Bell passe encore pour l'un des Pink Floyd les plus flans... Pf ! La guitare de Gilmour me semble n'avoir jamais été aussi majestueuse... Le son, aussi vaste... Mais au-delà de sa production d'une ampleur démente (bien pousser le volume sur l'intro), ce chant du flamant tient de l'aspiration à la plénitude de l'homme accompli, sentant pourtant encore et toujours ce creux affreux dans son cœur. Las des guerres d'égo. Il évoque le deuil de cette jeunesse psychédélique, devenue ce patriarche audiophile abruti par la muzak deluxe... mais qui se remémore, la majesté cosmique qu'il pouvait déployer... Lamentation de ce souvenir d'insouciance, asphyxiée dans ce monde des entreprises, des industries. La raideur rythmique des eighties survit, mais aérée ; l'AOR ne veut pas mourir, et se laisse dériver dans les jolis sons réverbérés, en jetant des regards perdus vers la jetée... "What do you want from me ?" Sous son apparence de blockbuster calculateur, cette Cloche de la Division est d'abord un dépôt de bilan touchant. Un amas de gros slows, tardifs, ronflants mais fragiles, dont les facilités variéto-soupesques sont pardonnées par cette ambiance de crépuscule de guimauve aux teintes subtiles (la folk balnéaire de "Poles Apart"), de non-retour moelleux, lové dans l'écho le plus luxueux. Pink Floyd est resté mutilé, et pour éponger son gros chagrin, tous les billets du monde ne seront jamais que piètres kleenex. "Encumbered forever by desire and ambition... There's a hunger still unsatisfied". Cette musique est essentiellement relaxante, et pourtant d'une grande tristesse... Gilmour a étiré cette tristesse, comme l'on étale la pâte à crêpes, ou dresse la nappe du pique-nique. Sa guitare sera toujours là pour le consoler, résonner... "Marooned"... Plages privées immaculées et terrains de golf à l'infini, trous de vers mélodiques menant à tel ou tel niveau des années 70 atmosphériques. "A Great Day for Freedom" aimerait être une grande ballade piano rock à la Freddie Mercury, ou une chanson pour un Disney ? "Wearing the Inside Out" est-elle une "Comfortably Numb" du pauvre, calibrée pour les dîners aux chandelles micro-ondés... ou une chanson les plus déprimées de Pink Floyd, avec sa langueur-fadeur assumée digne d'un Bowie gavé de benzos ("Extinguished by light, I turn on the night, wear its darkness with an empty smile") ? L'aquarelle variété de "Take it Back" recycle Springsteen, ou U2 ? "Lost for Words" glisse comme du Dire Straits fainéant, ou... glisse tout court ? Peu importe : la ringardise de Momentary se meut en friandise, et on revient à quelque chose de cette tristesse sereine, tartinée comme au temps de Wish You Were Here, dont The Division Bell est un digne successeur - et le meilleur Pink Floyd depuis. Le seul vraiment bon depuis. Pink Floyd n'a pas eu la chance, comme Genesis, de pouvoir compter sur un chauve aussi déter que Phil Collins pour se transformer en machine de domination pop implacable après la perte de son leader ? Tant pis, le gros Floyd re-carbure à la mélancolie. La dilu-maturation vers la vaste entreprise rock planant, le grand œuvre atmosphérique, s'est beaucoup faite via Gilmour... progressivement. Certains disent que de nobles albums sont sortis pendant cette phase, qui a grosso moogo commencé au creux d'une oreille teintée d'aigue-marine.

Dans cette optique, The Division Bell est l'album-somme, non pas de Pink Floyd, mais de Gilmour. À la fois ouvert à tous vents et regards, et nassé dans son spleen au parfum de linge tout juste sorti de machine, qui est son impasse artistique. Impossibilité de revenir aux années sacrées ? Mais le cœur s'exprime. L'iris est azuré, porté au-delà de toutes les digues. Gilmour, avec sa brave tête de prune ensuquée aux yeux plissés de trop scruter les horizons inatteignables, sa délicatesse de Monet de la six cordes, nous mène, pas à pas, à la conclusion, mirifique, par de voluptueuses manœuvres... La mélancolie est dodue, et si douce... C'est une madeleine en forme de baleine. Et je la caresse sans honte, cette baleine. Je glisse et fais danser mes doigts dans ses longs fanons, comme dans une cascade, coule et me roule dans l'écume, solidement arrimé aux poignées d'amour de ce Floyd avachi, maître de son élégie au long cours... De honte je n'ai point, quand j'entends la Pink-Fluide "Keep Talking", avec son speech robotisé de Hawking, ses ondes gospel extra-soyeuses. Un des titres les plus envoûtants et loungétranges du groupe, aux ondes communicatives (puisque c'est le thème). Les mauvaises langues diront que c'est du recyclage de "Not Now John", ces chœurs, mais, euh... C'est pas vrai, na ! Cette échelle rythmique mène à l'Éden. La Cloche, matinale mais funèbre, sonne l'inoubliable final : six petites pianotes, puis l'ascension aux hautes sphères de la nostalgie, par ce qui reste le solo le plus émouvant de toute l'œuvre de Pink Floyd. "High Hopes", sommet mélodique du Gilmour, d'une sincérité et d'une pureté inouïe, s'étire dans son écho infini. L'évidence du chant, plus encore ce son de guitare transcendant le céleste, est une injection d'élixir de sublime dans mon âme amollie par la routine. Orgasme de rorqual muant en faisceau lumineux mélodique transperçant le Cosmos. Et qu'on ne vienne pas me parler de guitare-héroïsme à crinière après ça, ou je noie un chaton. Gilmour n'astique pas le manche pour le sport mais pour le spleen : sa paluche nous lie à l'essence de sa peine intime, cétacé aux songes de cristal... Forever and ever... Qu'importe les quolibets des puristes du Floyd d'antan, qui ne parviendront pas à souiller cette aurore, jamais, même juchés sur leur culte du toxico schizo. Ce Barrett qui n'a jamais été aussi présent qu'en étant absent. Comme ces enfants disparus, changeant à jamais le mode de vie de leurs parents... Car c'est incontestablement dans ce manque si pesant que la dramaturgie du groupe prend source. Deuil d'un vivant, sentiment profond de frustration et de culpabilité, qui confèrent cette aura à la fois bourgeoise et tragique à Pink Floyd, ce poncif progressif pour le commun des mortels, et pour tous les vieux cons qui ne savent pas quoi écouter en fond, mais qui peut aussi vous toucher droit au cœur. Que dit "High Hopes", sinon le long murissement de ce regret inconsolable ? Les lignes sont explicites. Oui, tout ce qui précède semble n'exister que pour mener à cet instant. Aucun titre de Pink Floyd ne m'a plus ému, bringuebalé du littoral à l'ozone, des Limbes à la Voûte, et c'est ainsi. Être sensible aux songes tendres, je rumine insatiablement cette complainte bonbon arlequin, léché par les embruns, perché sur une falaise des Highlands...

note       Publiée le mercredi 6 avril 2022

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zugal21 Envoyez un message privé àzugal21

Concernant The Wall, on trouve ici passionné débat sous la chro qui lui est consacrée.

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Raven Envoyez un message privé àRaven
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Animals ? On est mals.

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ProgPsychIndus Envoyez un message privé àProgPsychIndus

Et "Animals" !!! Super album aussi comme "the Wall" de diou !!

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Coltranophile Envoyez un message privé àColtranophile

The Wall: l'extase pour certains, une torture pour d'autres. Les coups et les douleurs.

nicola Envoyez un message privé ànicola

Chacun ses goûts, hein. Je reconnais que The wall est un album à part, certes, mais il m’emmerde et pire, je le trouve boursouflé, pas A momentary lapse of reason.