Landberk › Riktigt äkta

Après Anglagärd et Anekdoten, c'est avec Landberk que nous clôturons ce palpitant chapitre du renouveau progressif suédois. Ces trois formations, aux personnalités distinctes, ont toutes trois développé leur propre grammaire pour le plus grand bonheur des auditeurs aux affinités diverses. Publié à l'origine en 1991, c'est sur le tard que le label suédois Record Heaven nous permit enfin de faire connaissance avec leur premier album, leur seul vrai album progressif stricto sensu. "Riktigt Äkta" avait pourtant eu droit à une adaptation taillée sur mesure pour le marché anglo-saxon et rebaptisée pour l'occasion "Lonely Land" (sur The Laser's Edge, en 1992) : à la lumière de cette réédition, nous sommes à même de percevoir à quel point tout le charme qui se dégage de l'album original tend à disparaître avec sa version dans la langue de Shakespeare. Le chant suédois sied à ravir aux historiettes jouées au mellotron et à la flûte, donnant l'illusion d'une incantation elfique tout droit issue d'un épisode de Tolkien. "I Nattens Timma" qui ouvre l'album correspond en tout point à ce descriptif et renvoit également aux références du passé, comme le fameux "Lord of the Rings", justement, de Bo Hansson. L'ambiance brumeuse de ces landes oubliées hante tout l'album de la première à la dernière plage. La voix lascive de Patrick Helje est appuyée par d'autres fortes personnalités : Simon Nordberg qui marie retenue et efficacité avec une rare aisance aux claviers, Stefan Dimle en solide mais souple bassiste, et enfin Reine Fiske sur les épaules duquel repose en grande partie toute la réussite du groupe. Loin d'être un guitar hero, Fiske privilégie les notes par petites touches (comme sur "Trädet"), les sonorités évocatrices, les ambiances (sur "Visa fran Kallsedet") plutôt qu'un gros solo bien gras et bien enlevé. D'ailleurs, cette prédisposition nous laisse déjà entrevoir vers quel esprit d'extrême synthèse le groupe va se tourner pour le restant de sa (trop brêve) carrière.