Je n’aurais jamais pensé devenir fan de Trance to the Sun. Pas avec ce premier album. Je ne sais pas comment mais un jour Ashkelon Sain a découvert les Cocteau Twins et ce jour-là, il a trouvé le Graal. Toute la musique de son projet est inspirée par eux, à tel point que l’élève a dépassé le maître… Dès le départ en fait. Si ‘Ghost Forest’ porte la marque des Ecossais, notre Américain a porté l’expérience plus loin que jamais peut-être n’en ont rêvé les Faux Jumeaux… Pratiquement aucune voix, des titres dépassant souvent les six minutes en moyenne…Trance to the Sun porte l’heavenly tellement loin qu’il l’intoxique, l’assèche. Rien de luxuriant ou de vénéneux comme sur les disques suivants, tout ici évoque une forêt calcinée (le titre est donc bien choisi) ou le désert. Des nappes, encore des nappes, Sain joue avec ses effets, laisse ses accords, ses arpèges, monter en volutes, en vagues comme si une mer invisible égrenait ses vagues dans l’esprit de l’auditeur ; il prend son temps, étire ses notes. Les morceaux se suivent quasiment sans transition, comme une forme de masse évoluant au ralenti, magnifique mais jamais totalement confortable. Souvent, une boîte s’installe, sèche mais travaillée, qui renforce l’impression de transe. Si le travail sur la guitare et ses effets est remarquable, celui sur la basse ne l’est pas moins, certains passages sont absolument monstrueux (‘Eonite trip’, ‘Antarctic twilight’). Ces tissus musicaux fonctionnent aussi comme un mur, pas toujours évident de s’y frotter et j’avoue avoir dû m’y reprendre à plusieurs reprises pour goûter le voyage dans ces montagnes russes au ralenti. Sans y parvenir totalement au final car si les premières compositions nous happent, le disque finit par traîner en longueur… Comme si le démiurge s’était égaré en chemin, dépassé par sa propre magie… On a l’impression qu’il improvise de plus en plus, lance ses notes, les contemple prises dans leurs filets d’effets, s’amuse à les modifier pour découvrir ce qu’il en résultera. C’est là qu’une voix féminine aurait pu agir comme un guide, même lointain, comme sur ‘Cauldron street’ mais non... C’est déstabilisant, ennuyeux aussi, surtout que la nouvelle version propose trois inédits (dont le beau ‘Antarctic twilight’, ne nous plaignons pas). Il est certain en tout cas que voilà un premier essai qui part loin dans l’audace et que musicalement, il évoque exactement ce qu’il est supposé évoquer, un voyage de plus d’une heure à tourner en rond dans une forêt morte… Parfait pour s’oxygéner l’esprit ? Trop peut-être... Aussi beau, pur, sans compromis, que '2001 l'Odyssée de l'Espace' mais aussi peu évident à s'enfiler si l'on n'est pas prêt. J'aurais envie de lui coller un 6 mais je ne puis m'y résoudre.