Un piège, les Sleaford Mods, tu te dis qu’avec une formule si restreinte, tu vas te lasser; deux ou trois disques et ça va tourner en rond. Moi même j’en étais arrivé à une conclusion semblable: ‘Spare ribs’, achat pas indispensable, je commence à en avoir beaucoup, de ces disques… Et voilà une amie qui le trouve dans une boîte à livres (ben oui, moi aussi je mets des DVDs et des cds dans les boîtes à livres, le but c’est bien de faire circuler gratuitement, non ?), me le propose; forcément, je n’allais pas dire non. Bien m’en a pris. Je ne vais pas dire que le duo parvient à nous surprendre, faut pas déconner, mais il parvient malgré tout à se renouveler. Mais qu’est-ce qui fait qu’on en revient si aisément aux Sleaford Mods comme une mouche sur un crottin ? Une formule si rachitique que… Et si c’était précisément le secret de ce son si unique ? Cette instrumentation si dépouillée qu’on s’y sent bien, comme dans un groove un peu torve mais jamais étouffant…On s’y cale à l’aise parce qu’on y a de la place; du coup, les vocaux de Jason Williamson se tapent l’incruste comme le pote qui vient te causer tandis que tu mates le show depuis le bar. On va passer la soirée avec eux, sans bouger, même pour aller pisser. Nos Anglais se pointent tout de même avec quelques nouveautés, notamment deux duos: ‘Nudge it’ (du tube en barre) avec Amy Taylor (Amyl and the Sniffers) et Billy Nomates (j’ignore tout de cette chanteuse) sur ‘Monk’N’Mindy’. De manière générale, le flow de Williamson est davantage ‘chanté’ que par le passé, ce qui rend le groove encore plus irrésistible (‘Shortcummings’, ‘Elocution’, ‘Nudge it’…). Il y a aussi que Andrew Fearn colore volontiers ses loops faussement post punk d’électronique de manière précise, concise, efficace (‘Spare ribs’, ‘Nudge it’, ‘All day ticket’, ‘Thick ear’ qui dégage quelque chose de Suicide…), ce qui ajoute un air de neuf. Grosso modo, le duo maîtrise de toute manière complètement sa formule, il a pris suffisamment de temps pour cela. Le travail de quinze années de DIY forcené paie et pas uniquement en matière de reconnaissance artistique, aussi pour l’écriture, cela s’entend. Donc, oui, les Sleaford Mods ont encore des choses à nous dire et de manière suffisamment variée pour que l’on continue à s’intéresser à eux de manière sincère. La sincérité, justement, une autre de leurs qualités et pas des moindres…