Andi Sexgang › Achilles in the Eurozone

Qu’est-ce qui a conduit Andreas Mc Elligott alias Andi SexGang à s’intéresser ainsi à l’Antiquité ? Je n’en sais rien, mais si on se souvient de ‘My Cicero’, il est clair que les métaphores du genre abondent ici dans un contexte que l’on devine braqué sur l’actualité (‘Divinely Nero’, ‘Achilles in the Eurozone’, ‘Greeks in Casablanca’, ‘Theban band of lovers’). D’autres références géographiques, parfois douloureuses, sont aussi au rendez-vous (‘Sarajevo in the valley’, ‘Freedom call Jerusalem’). Depuis ‘Madman in the basket’ en 2006, l’Anglais sort des disques avec une remarquable constance tant dans la quantité que la qualité, même s’il le choisit pas toujours la facilité ni l’accessibilité. A ceux qui lui reprocheraient ses disques trop arty, celui-ci s’approcherait davantage d’un disque de Sex Gang Children, à ceci près qu’à l’image de chacun de ses productions ‘solo’, cette dernière est une véritable boîte de Pandore. Pas spécialement rapide, torve dans ses ambiances, il développe une certaine acidité face à la situation contemporaine dans une pure veine Andi SexGang; nul besoin d’agressivité ouverte, tout est dans le verbe et finalement également dans la musique, apparemment simple dans ses lignes (on sent que sa vocation est principalement d’accompagner la voix) mais qui au fur et à mesure des écoutes dévoile des atmosphères fortes, ambiguës. D’un départ grinçant, batcave, ironique (‘Flesh’), caustique, on glisse à l’excellent ‘Sylvian Plain’, fantomatique et vicieux, à la limite de l’émouvant pourtant. En règle générale, beaucoup de morceaux débutent de manière assez plate, développant imperceptiblement une ambiance catchy et fascinante au fur et à mesure. ‘Sister got a gun’ dégage ce côté valse batcave crissante typique du Sex Gang Children seconde mouture. L’acoustique ‘Greeks in Casablanca’, plus ensoleillé, rompt cette logique plombée, les compositions suivantes, exception faite de ‘Tell the king the sky is falling’, s’avérant plus calmes mais tout aussi vénéneuses ainsi ‘Divinely Nero’ chanté sur le ton d’une comptine cruelle, idem avec le refrain faussement enfantin de ‘Theban band of lovers’ dont le couplet frise le rap (version Andi SexGang, rassurez-vous, c’est malsain); ‘Scribble boy’ évoque des échos de ‘My Cicero’ mais en plus lent. Si on a l’impression que l’artiste se disperse dans toutes les directions, les écoutes contrediront ce point de vue; ‘Achilles in the Eurozone’, dans sa diversité, demeure remarquablement cohérent comme c’est souvent le cas dans les albums de Andi SexGang, magicien des mots mais également des ambiances. Il y a certes quelques longueurs, une ou deux maladresses, mais globalement, voilà un des meilleurs essais solo de notre excentrique Anglais. Un disque moins récité et davantage porté sur la chanson même si le besoin de témoigner dans la chaleur de l’actualité reste en toile de fond. Qui est donc ce Achille ? Il aura bien des épreuves à surmonter pour débloquer l’imbroglio européen actuel…Une bonne idée réduite en cendres par la cupidité des uns et l’ambition des autres, au détriment des populations comme toujours.