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Judas Donneger › Abats

mp3 • 7 titres • 26:23 min

  • 1La vie c’est cool3:44
  • 2Cauchemar de la peau3:14
  • 3Les Fusillés2:25
  • 4Pornograhie et coca-cola3:39
  • 5Lugubre3:46
  • 6Guerrier de la colère5:57
  • 7William S. Poulpos3:38

informations

« Cd-r de trucs qui traînaient à gauche à droite. 2011-2013 ». Plages 1 à 5 enregistrées par Capitaine France. Plages 6 et 7 enregistrées par Robin.

Pochette : Jason. Ce disque s'écoute et se télécharge - à prix libre - à l'adresse suivante : http://judasdonneger.bandcamp.com/album/abats

line up

Dominou, Pavel (Klaus Legal), (Tas de viande et Sac d’os)

Musiciens additionnels : Jeanne (violon sur 4), Kala Lunatic (mixage, bidouille sur 5), Marine "Esox Lucius" Klotz (saxophone sur 5), Fred (introduction et juste prononciation de "Judas Donneger")

chronique

Les mois, semaines, jours, redisent les questions : des échéances ou pas ; de l’évidence à saisir qu’il faut se dire, se faire soi-même sans fermer ce que dehors on perçoit ; du doute qui est la marge, la méfiance nécessaire de ce qui tournerait axiome ; le goût – ça viendrait à manquer, vite – des compagnies bavardes ou qui n’en ont pas besoin ; la conscience aigüe des présences physiques dans les foules ou les lieux plus ouverts ou cachés, où l’ont vient de son vrai pas. Et puis : saison aux degrés chiches mais cette ville a de beaux restes ; et diantre, ce que j’aime ces heures dans certaines périphéries, enceintes sans loyer, circulations sans contrat.

Drôle de trip, l’autre nuit, tiens… Nous sommes un petit groupe, dans une sorte de hangar. Tenus en otage ou simplement gardés là, empêchés. Par des types d’extrême droite – ce sont eux qui le disent, révolution conservatrice, bobards national-économistes. Ils ont des tronches un peu Sardou ; le type de physionomie qui se fane dès la jeune vingtaine ; qui dès le début n’a jamais le teint frais. Des types qu’on croiserait dans les pages d’un Manchette : paumés, exécuteurs, petits ambitieux, simples ordures – question de hasard, de degrés dans une hiérarchie, guère plus. Le modèle vieille France Commissaire Moulin, pas au fait des dernières mises à jour de la saloperie, BFM et autres déclinaisons ; ceux-là se sont munis d’armes de poings et de matraques. Cet endroit, au fait, on dirait l’espèce d’entrepôt, d’usine ou de prison ou d’école désaffectée où jouent Joy Division dans le clip de Love Will Tear Us Apart. Bon. L’un de ceux qui nous séquestrent – un "cadre" ? – annonce aux autres – et à nous – qu’on va se séparer en plus petites unités ; un de ceux côté crosse pour deux au bout du canon – question de contrôle plus efficace. On se retrouve dans une plus petite pièce. L’un des tristes sires ; une nana noir-vêtue, lunettes, cheveux plats ; l’air calme, presque de se foutre de sa gueule par devers soi, à l’autre ; et moi. Le mec a l’air d’avoir un truc qui frotte, une gêne ; conscience, hémorroïdes ou quelque sorte d’autre ulcère. La fille – c’en est une que dans la vraie vie je croise ; pas si rarement mais sans que vraiment on se connaisse – s’assied en tailleur sur le sol, à un moment ; elle se met à réciter – à inventer ? – des "trucs deleuziens" ; c’est exactement comme ça, en tout cas, que je les entends ; je regarde le type ; je me dis "pauvre type" ; je me dis qu’ils craqueront avant nous ; je me sens très calme aussi, tout à coup ; je pense un truc du style : "ne pas se faire une raison même si ça tiraille, qu'il y a danger de mort – c'est le moment de ne pas se laisser éteindre" ; tout le monde sait que ça a toutes les chances de finir en bain de sang…

Pourquoi je vous raconte ce rêve ? Eh bien voilà : parce que tout de suite après – et ne me demandez pas le détail mais je trouve là-dedans une sorte de logique, de cohérence – l’envie m’a pris, urgente, de réécouter tout Judas Donneger. Pas pour y chercher du sens. Plutôt, peut-être tout simplement, parce que je sens ce truc, dans leur musique – qui fait écho profond, qui ne me laisse pas tranquille : l’impossibilité de vraiment abandonner, de lâcher l’affaire ; la noirceur sale mais la résistance chevillée, presque mauvaise herbe ; ce qu’il y a d’exactement humain dans cette chaleur animale que nous exhalons, nous seuls – détail dans les degrés, spectre thermique que n’ont pas les souris, les cafards, les familiers dits domestiques. Je vous parle de ce disque – Abats – parce que des autres, j’ai déjà dit ce qu’ils m'avaient balancé. C’est une curieuse collection, celui-là. Disparate. La Vie C’est Cool – sale blague phonétique, on comprends tout de suite – est peut-être l’un de leur rares textes qui ne me plante pas d'emblée, à quoi je trouve une certaine maladresse. Pourtant il dit nettement, peut-être encore plus crûment que d'autres. Il entre avec les écoutes. Beaucoup de ce qu’on leur connaît, dans ces plages, de leur substance corrosive, paille de fer qu'on remet – mais dans des formes comme alternatives. Parfois comme s’ils cherchaient encore le bon angle. On dirait qu’ils essayent. Il y a des ombres qui rampent à d’inédites vitesses. Il y a Cauchemar de la Peau qui fout le frisson immédiatement. Les Fusillés, c’est étrange, même pour eux… Décousu. C’est glaçant. Ça murmure comme le sang qui siffle aux tempes, aux tympans. Ça me rappelle encore mon rêve, tiens. Aussi, ils nous donnent une version de Pornographie et Coca-Cola striée par un saxophone presque à la Béru. Impression d’un Endémique qui n’est jamais vraiment pareil, le parfait identique comme défaut de perception, facilité morbide qu’il faut déjouer, défaire. Lugubre est nue, plus qu’ailleurs encore. Je la trouve folle, magnifique, incendiaire, inespéré cœur-au-ventre… La musique de ces mecs dit que ça n’est pas une marque, "l'alternative", une variante du produit, une adaptation du tour ou de la teinte aux récepteurs d’un genre particulier de gogos ; c’est une brèche – c’est à dire un trou, une plaie pour loger les particules, les bacilles. Pavel cite Il Était Une Fois – le groupe, oui – et sa voix traîne dans le magma d’électrons, de synthés, comme elle fait ailleurs, dans ce groupe qu’ils nomment Dalida. D’accord : ce disque là laisse peut-être une marque moins nette, tient moins constamment cet éveil tendu qui fait mal mais où l’on se retrouve entier. Rien de ce qui sort des tripes et têtes, doigts, gosiers, poumons, vésicules de ces deux là et de leurs machines, pourtant, ne parvient à tomber vraiment à plat. Des entrailles – hors calibre ou pas – on ne fait pas catalogue, à moins d’être trafiquant. Les viandes et os, cartilages ici jetés exhalent la matière, le souffle des songes trop pertinents pour rassurer, trop réels.

Je me suis réveillé tôt, cependant, ce jour là. C’était l’un de ces matins où l'on ne se sent rien de "collé". (Quelques heures plus tard, alors que je rapportais la vision à un pote, l'huile dans la casserole laissée sur la plaque s'est soudain embrasée avec le grondement déchiré qu'ont ces combustions – facétieux incidents que font relâche d'attention et thermostat quelquefois défaillants).

note       Publiée le jeudi 29 janvier 2015

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    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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    Aux vents qui sèment la tempête/Se récoltent les jours de fête...

    (Les rendus des deux versions sont pas complètement les mêmes, je dirais).

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    Klarinetthor Envoyez un message privé àKlarinetthor

    oui je n'impliquais pas la renonciation, parfois c'est plus triste de voir des gens lutter, contre des choses plus fortes qu'eux; après j'ai peut-etre tout simplement imprimé ma dépression sur ce disque; ou que je ne suis pas fait pour l'écouter le matin/midi. En tout cas ça me le fais particulièrement sur Abats, par rapport à la demo, le mort à l'hosto, ou les Millions qui y sont encore. Abats m'abat, (alors qu'Abba non, peut-etre)

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    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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    Ah ! Ça... Je ne le dirais pas aussi catégoriquement. Curieusement ça ne m'a jamais "abattu", Judas D. Ils ont un truc unique - dans toute la "vague amiénoise" mais pas que - dans leur façon de saisir tout le dégueulasse de notre époque et de restituer cru qui paradoxalement ou pas ne tourne pas au simple déprimant. Enfin... En tout cas perso ça me fait plus l'effet "ne pas se conformer à la merde" que "abandonne" (ou alors au sens "vous qui entrez ici"... mais on sait bien que ça veut dire "traverse les avec les yeux ouverts, ça vaut mieux que rêvasser aux cieux").

    Par contre oui : celui-là est plutôt à écouter après tout le reste. Moins direct, on sent effectivement le côté essais, tentatives de certaines plages (Les Fusillés, oui, que j'ai d'abord trouvé pas terrible du tout mais que j'aime de plus en plus... La version saxuée du porno-coca...). Ça fait davantage "sens" sans aucun doute en connaissant ce que fait le groupe en plus "ferme" (en formes décidées et cohérentes sur la longueur d'un album ou d'une démo, quoi).

    (EDIT : Putain, "Lugubre"... En fait ce que font ces mecs est horriblement... pertinent. C'est ça, le mot que je cherchais, ouais).

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    Klarinetthor Envoyez un message privé àKlarinetthor

    C'est clairement pas par la qu'il faut decouvrir le groupe, mais c'est pourtant a ecouter pour les amateurs du groupe: assez jusqu'au boutiste souvent, dans la noiceur de l'instru de Cauchemar, dans le coté percant des fusillés. Le groupe est mutant, on ne sait si c'est Dalida qui a changé des choses dans leur tete, incorporer le chant de Pavel completement opposé a celui de Dom. Encore moins a ecouter un jour de déprime.

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    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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    Qui donc, qui est Corleone ?

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