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Bruce Springsteen › Nebraska
- 1982 • Columbia records 38358 • 1 CD
cd • 10 titres • 40:51 min
- 1Nebraska
- 2Atlantic City
- 3Mansion On The Hill
- 4Johnny 99
- 5Highway Patrolman
- 6State Trooper
- 7Used Cars
- 8Open All Night
- 9My Father's House
- 10Reason To Believe
informations
Chambre de Bruce Springsteen, Colts Neck, New Jersey, janvier 1982.
line up
Bruce Springsteen (chant, guitare, harmonica, mandoline, glockenspiel, tambourin, orgue Hammond, synthétiseur)
chronique
Par hasard, j'ai ressorti ce petit disque qui paye pas de mine. Il était resté au fond de mes tiroirs, j'me suis dit comme ça "pourquoi pas l'écouter". Nebraska n'est pas de ce Springsteen qu'on appelle "The Boss", c'est même tout le contraire. C'est son album le moins tape-à-l'œil, l'un des albums les plus bruts qu'il soit possible d'enregistrer. Pas mon préféré, non plus, enfin je crois... Il a plus souvent été ce compagnon un peu pouilleux, sifflant au loin... Ce qu'il est, sans nul doute. Un type, ce genre de type devant qui on doit passer sans se retourner, libre de poser son barda pour l'écouter, partager avec lui quelques lampées de notre flasque. Ou abandonner sans se retourner. Aucun des deux choix ne mènera à un bouleversement, de toute façon. Nebraska ce n'est pas le Springsteen qui me traverse la tête quand je pars au boulot. Ce n'est non plus lui qui m'a accompagné quand j'avais besoin d'une voix amie - plutôt Leonard, ou Neil, que Bruce, dans ces cas-là, que je n'ai jamais pris contrairement à certains fâcheux de ma génération comme un simple rockeur un peu beauf a laisser trôner vers la hi-fi du paternel, mais que j'ai toujours vu - même sous le groove clinquant du E Street Band, comme un raconteur de moments, de petits riens... ce type, je le vois comme ça. Un passeur. Un évocateur. Et Nebraska est - personne ne pourrait le contester au vu d'une telle économie clocharde de moyens - son évocation la plus dépouillée. Nul n'en doutera donc, si j'affirme que Springsteen doit arriver dans nos archives par Nebraska, et aucun autre. Ce n'est pas l'album d'un musicien, d'un grand artiste, d'un poète. Nebraska, c'est juste l'album d'un type. Et ce type avait besoin de respirer. On lui demandait trop, ou on l'avait pris pour un autre... Bien sûr, la sobriété simple et l'honnêteté presque fainéante de ce petit disque qui paye pas de mine sont connues, je ne répéterai donc pas à quel point l'humilité ouvrière de la musique à l'œuvre ici est une anomalie en '82. On l'a trop dit, et nombreux sont les contre-exemples, plus qu'on le croit... et puis comparer sans cesse, c'est fatiguant, à la fin. On peut aussi s'asseoir et écouter... et il s'en passe des choses, dans ce petit disque de rien. On y entend un homme seul, en chemise bon marché et denim usé, assis au pied d'une éolienne dressée au milieu de nulle part. Il grattouille sa guitare, souffle dans son vieil harmonica, tisse des portraits d'assassins et de victimes, comme on sculpte un vieux morceau de bois au canif... Ce type parle dans le vide ou pour qui veut l'écouter. Sa langue n'est pas déliée par l'alcool. Et il ne fait que passer, là où de nombreux autres sont passés avant lui, d'autres voyageurs, d'autres conteurs... Le cul posé sur un vieux tabouret usé par ceux qui reposent aujourd'hui sous terre et qu'il ne fait que suivre. Comme eux, il évoque. Car Nebraska est une évocation, rien de plus. Pas parfaite. C'est une évocation d'homme. Le regard est celui d'un homme, la voix aussi... on perd des détails au passage, parfois des choses importantes, et c'est drôle, mais des subtilités qui ne devraient pas rester restent... comme dans les souvenirs. Nebraska n'a pas bougé depuis trente ans. On ne vieillit pas quand on est fait d'os, de poussière et d'âme. On est déjà inscrit dans la terre. Prêt à disparaître. J'ai ressorti ce petit disque qui paye pas de mine, comme on ressort une photo oubliée, froissée, de son portefeuille... un portefeuille, ça dégueule de trucs laids et sans âme qu'on sort pourtant tous les jours, comme des cartes bancaires... et ce qu'on peut y oublier, si longtemps parfois... C'est drôle, quand même, à quel point les choses essentielles peuvent être négligées. Mais après tout, nous ne sommes que de simples hommes, nous aussi.
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- Tallis › Envoyez un message privé àTallis
Merci de m'avoir donné envie de le réécouter, messieurs.
- Wotzenknecht › Envoyez un message privé àWotzenknecht
My father's house...
- Note donnée au disque :
- coronavirus › Envoyez un message privé àcoronavirus
Mais tellement
- Note donnée au disque :
- Raven › Envoyez un message privé àRaven
Oui, un repli sur soi et le besoin de faire le vide autour de soi, de respirer en jouant une musique beaucoup moins chargée, la peur de finir par jouer un rôle étouffant derrière les grosses guitares et les cuivres clinquants, il a sorti ce disque avant tout pour lui et il a eu raison, le résultat final peut parler à tout le monde, un jour ou l'autre.
- coronavirus › Envoyez un message privé àcoronavirus
Moins tape à l'oeil , oui . Déjà il n'y a pas son visage en couverture d'album ce qui annonce un truc différent. La recherche d'une solitude pour se tenir loins des remous de l'existence? Probablement.
C'est un disque assez brumeux et crepusculaire . Pas franchement confortable et accueilant, mais pourtant une magie bienvaillante se dégage au fur et à mesure qu'on prends le temps de comprendre ses poésies
Message édité le 20-01-2025 à 19:21 par coronavirus
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