‘Under the red veil’, c’est le spectre de Rudolph Valentino qui déambule sur un boulevard pluvieux de Barcelone, l’urgence de la vie qui freine quelques instants dans le brouillard, les confessions d’une âme née sous les spots qui danse sous les néons à la lueur des chandelles. Légèrement plus dépouillé que ses prédécesseurs, axé sur des sonorités grises, il se dévoile rugueux, sensuel certes mais comme une main nue caresse les aspérités d’un mur de crépis. La colère passionnée s’est muée en une amertume mi-blasée mi-fâchée, toujours en quête d’amour et de vérité pourtant. Le chant paraît hanter les compositions comme le narrateur de saynètes truffées d’interrogations. De fait, ce troisième opus des Tearful Moon ne navigue pas très loin des eaux de Boy Harsher mais avec la volonté de s’ancrer fermement dans la réalité, comme une entité de chair spirituelle et non un esprit incarné. Dansant mais pas que. Gris mais pas que. Je mentirais en affirmant que je n’y sens pas un léger essoufflement mais jamais le duo ne laisse cette impression perdurer. Le timbre particulier de Sky Lesco contribue beaucoup aux atmosphères et aux nuances de chaque pièce. A bien des moments, on a l’impression qu’elle lâche prise, cherche à s’envoler, se détacher, avant de fondre à nouveau dans la réalité de manière parfois musclée (l’excellent ‘Set me free’, ‘Heart is fire’). Lointaine mais proche. Un album de contrastes réunis dans une homogénéité presque mystique à l’image de sa pochette.