Batterie binaire, mécanique, plus froide qu’une boîte à rythmes. Rugissement de basse et guitare, voix je-m’en-foutiste et absente… Qu’il est glam, cet album… Pourtant Walter Franco n’a rien à voir avec les sémillants Secos & Molhados, plutôt avec Caetano Veloso période tropicaliste et Jards Macalé, autre iconoclaste à la présence fuyante et singulière. Ce-dernier reprendra d’ailleurs le raide défoncé "Caburro Babucho" sur son album Contrastes, cette même année 1977, comme un coup de pouce d’un damné à l’autre pour ce Walter Franco dont personne ne voulait reprendre les chansons, comme s’il risquait de refiler le Jinx à quiconque s’y aventurerait. C’est que pour un enfant de la MPB des 70’s, il semble avoir plutôt coupé les ponts avec la musique brésilienne d’arrière-garde, le Walter. On cherche en vain la filiation avec la bossa ou le samba, il n’y en a pas ici. Si l’album précédent était un véritable Fuck adressé à son monde, Revolver se veut un genre de volte-face plus positive, dont la pochette et le titre revêtent de multiples significations… Références à l'album des Beatles, au Lennon traversant la rue de Abbey Road, donc au costume blanc de l’homme de paix, sans oublier le côté activiste fliqué du mec, idée reflétée dans un brésil où les musiciens sont tous surveillés de près comme des Mesrine en puissance. Mais en fait, le Lennon de ces années-là était surtout un gros junkie, et ce Revolver est au final surtout une bande-son pour virée nocturne, sachets plastiques qui changent de main, néons qui se répandent sur le bitume huileux, ruelles désertes, balades sévèrement stone dans les vapeurs de l’oubli, comme sur cette fin d’album qui vire au splendide dans sa catalepsie onirique… Partir do Alto-Animal Sentimental, un des rares accès de groove de cet album autrement d’une raideur (ou mollesse c’est selon) cadavérique, est une rengaine bloquée à l’étage disco-grunge, comme l’Iggy Pop de Sister Midnight qui aurait troqué les amphèts pour quelque chose de plus enfantin et régressif. Walter Franco fait rarement un tel effort de construction, préférant aligner les ritournelles mongoloïdes comme Toque Fragil, où élaborer un prog à la Yes version Reductio ad Absurdum (Arte e Manha), affublé d’onomatopées et de brisures zappaïennes. C’est pas si loin de ce que fait aujourd’hui un certain D Mingus un peu (beaucoup en fait, mais toujours au Brésil) plus au Nord, le côté prog en moins. La ritournelle de fin vient achever de bercer nos neurones qui apprécient décidément beaucoup ce marchand de sable à la voix éteinte, dont la notoriété semble à l’époque avoir suffit à le faire inscrire sur la fameuse "NWW list", dont il sera le seul brésilien, voire un des seuls (le seul ?) représentant de l’Amérique du Sud…