"Garçon ! Vous nous remettrez la même !" On n'arrête pas les Cryptic Slaughter comme ça, qui même pas un an après remettent le couvert, pour se faire les défenseurs d'un futur qu'on peut bien hypothéquer puisque de toute façon il n'existe pas. Et par une admirable pirouette de langage ils arrivent encore à digresser douze titres supplémentaires, à peu près aussi distinguables les uns des autres qu'une cravate de Ronald Reagan un jeudi qu'on comparerait à une cravate de Ronald Reagan un vendredi. Cryptic Slaughter parle le langage du blast beat comme un syndicaliste emporté dans une tirade pusillanime, intarissable et animé par la profonde conviction que l'arme nucléaire c'est à la fois la cause et la solution à tous nos problèmes. Ils ont une idée en tête, il faut qu'ils l'écrivent trois cent fois sur du papier pour en être bien sûrs. Et à défaut de pouvoir coller ça sur des flyers façon scrapbook ANPE et d'aller les distribuer dans les rues sans se faire chopper par les flics, ils ont compris qu'on pouvait utiliser le radio-cassette enregistreur pour diffuser la bonne parole, comme à un discours du pape reconverti en défenseur punk à chien. Au rayon des nouveautés, on peut signaler qu'ils ont un peu appris à jouer entre temps - même si ça relève beaucoup plus du fantasme que de la réalité - surtout le guitariste à qui on serait presque prêt à accorder le privilège de l'élévation, du statut de très gros manche à celui de gros manche tout court, et puis la prod qui a un son un brin plus metal : ce qui fait à peu près autant de différence qu'entre une canette de lager et une canette de pils. En même temps c'est ça qui est bien avec Cryptic Slaughter, on est jamais trompés sur le menu. Tarte au macadam pur et verre de pisse tiède pour tout le monde.