Rosa Crux › Proficere

Combien de fois ai-je repoussé ou recommencé cette chronique…Parler de Rosa Crux, c’est un peu comme s’approcher du Graal, le matériau en est si précieux qu’on hésite à le toucher de peur de le souiller. Leur démarche unique et d’une intégrité absolue en fait l’un des groupes gothiques les plus originaux de ces dernières années. Rosa Crux réussit en effet le tour de force de capturer l’essence même de l’ésotérisme et de la spiritualité, mariant l’esprit du Moyen-Age et des cathédrales avec celui de l’âge industriel, les forces religieuses avec les énergies païennes, l’esprit avec la terre, pour des morceaux qui constituent une véritable liturgie profane. Rien n’est laissé au hasard, le groupe travaille lentement et soigne chaque détail en quête d’un sublime spirituel qu’il n’est pas loin d’atteindre d’ailleurs. La musique se construit autour d’un kit de batterie acoustique programmable conçu par le groupe lui-même qui donne ainsi l’impression qu’un orchestre complet l’ accompagne. ‘ Abbrasax’ qui ouvre l’album nous plonge directement au cœur du rituel, roulements de tambours, spirales de guitares sombres, plages d’orgue et voix incantatoire. ‘Morituri’, plus lourd, en reprend les textures en y ajoutant une dimension de profonde mélancolie qui atteint son paroxisme sur le superbe ‘Proficere’, plus intime et recueilli, avec piano et guitare déchirante. D’autres titres suivent des constructions plus rituelles comme ‘Eli-Elo’ou ‘Helhel’, notamment au niveau des percussion mais également de la voix qui scande des formules ésotériques comme un rythme, entrecoupée de battements de cloche, sur lequel se construit le morceau…splendide !’ Invocation’ et ‘Sumunt Mali’ prennent davantage des allures de marches guerrières dont la profondeur est renforcée par les chœurs. Comme son nom l’indique, ‘Orgue’ est une superbe pièce quasi religieuse où se mêlent subtilement la profondeur de l’orgue, des roulements sporadiques et des plages de silence où seul semble planer un léger souffle. La profondeur de l’atmosphère est telle que l’on pourrait se croire dans une cathédrale. ‘Ilfelo’ évoque de légers échos médiévaux et ‘Vil’ qui clôt magistralement l’album ressemble à une sorte de symphonie endiablée, grinçante et décalée qui donne une très légère touche indus. Que dire de plus quand les mots sont incapables de retranscrire les émotions d’une telle musique ? Ecoutez, vous verrez.