‘Siglo XX aujourd’hui’. Voilà, c’est dit. Cependant, même si ce résumé pourrait convenir, les choses méritent un zeste de précision car les Cowboys de la Lunes de Miel, même s’ils perpétuent bien l’héritage du groupe précité, chassent davantage sur les terres de And also the Trees, Crime and the City Solution ou même Inca Babies soit une musique intranquille, en perpétuel mouvement comme une houle. On la qualifiera d’intense plus que de violente, oscillant sans cesse entre un jeu subtil de lâcher et de retenue, une forme de blues urbain, légèrement plus héroïque (‘Time is not our friend’) que les formations précitées… Le côté western du nom ? Pas vraiment non, encore qu’en cherchant bien, on pourrait y déceler de fugaces influences d’un far west de cinéma de banlieue mais le propos n’est pas réellement là. La musique est riche, travaillée, sans perdre une forme d’immédiateté parfois presque (j’insiste sur le ‘presque’) allègre (‘Still (a song for V.)’) mais le timbre grave de Tom Van Troyen dans une veine Nick Cave assure à lui seul assez d’ombre pour empêcher tout tableau trop joyeux. Le ton est même carrément grave voire torturé (‘Sea without mercy’, ‘Everything is on fire’, ‘Up on the hill’ ) mais cela n’empêche quelques éléments plus légers ainsi le piano d’intro du magnifique ‘Broken men’ qui ne troublent en rien la grisaille du propos. Les Belges savent ciseler de belles mélodies et nous emporter dans les flux et reflux de cette musique tendue de colère, d’émotion, qu’elle se refuse à lâcher complètement, préférant laisser son sel nous ronger l’intérieur, nous hypnotiser par sa fougue sous-jacente. Deux fois le même morceau ? Oui et explication simple. L’auditeur(trice) notera qu’à partir de ‘When the sky paints blue’, le ton se plombe, surtout dans le chant qui se laisse de plus en plus aller dans ses accents torturés et pour cause, les morceaux ont été enregistrés live au festival Eurorock avec un son d’une telle qualité qu’on n’y remarque rien (les applaudissements ont été pratiquement gommés). Les Honeymoon Cowboys ont eu raison de nous proposer cet aspect-là de leur son car c’est bien sur scène qu’il révèlent tout leur potentiel, dans une tension entre Birthday Party et And Also the Trees avec des restes de Siglo XX (dont ils reprennent ‘Waiting for a friend’) que les compositions studio ont légèrement domestiqué. Tom Van Troyen est magistral, complètement habité et épaulé sans faille par ses collègues, la rythmique est imperturbable et la guitare se lâche avec un grain nettement plus rêche et un jeu nerveux (fantastique ‘The pain came’). Plus de nouvelles depuis, dommage, mais en tout cas, cet opus vaut largement et l’écoute et l’achat surtout pour celle et ceux qui trouvent And Also the Trees et les Bad Seeds trop apaisés aujourd'hui.