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Ture Rangström (1884-1947) › Musique de chambre

  • 1999 • CPO CPO 999 689-2 • 1 CD

cd • 19 titres • 75:25 min

  • Suite n°1 (in modo antico) pour violon et piano (1912) | 8:01
  • 1Intonation (andante moderato)1:51
  • 2Menuet (allegretto poco vivo)1:34
  • 3Sarabande (moderato - grave)3:14
  • 4Tambourin (allegro poco rubato)1:20
  • Capriccio amoroso (1936)
  • 5(in modo tzigane) pour violon et piano4:22
  • Poem (1942)
  • 6Pour violon et piano4:59
  • Mälarlegender - trois légendes pour piano | 15:27
  • 7Lento improvisato - quasi notturno6:37
  • 8Vivo moderato - maestoso & poco alla burla2:51
  • 9Andante molto lento - di legenda5:59
  • Arioso (1947)
  • 10Pour violon et piano4:25
  • Tre dansminiatyrer - trois dances miniatures pour deux violons | 5:50
  • 11Allegretto pomposo1:48
  • 12Con moto1:10
  • 13Alla minuetto1:43
  • 14Allegretto pomposo dacapo1:09
  • Ein nachstück in E.T.A Hoffmanns manier (1909)
  • 15Pour quatuor à cordes12:55
  • Improvisata (1927)
  • 16Pour piano7:01
  • Suite n°2 (in modo barocco) pour violon et piano (1920-22) | 10:55
  • 17Entrata (allegretto pomposo)2:46
  • 18Alla ballata (poco andante)4:32
  • 19Finale quasi grottesca (allegro molto e feroce)3:37

informations

Enregistré du 23 au 26 novembre 1998, Studio 3, Stockholm, et le 14 février 1998, De Geer Hallen, Norrköping.

line up

Mats Jansson (piano); Tale Olsson (Violon); Holmen quartet

chronique

Rangström n'a pas laissé une oeuvre de chambre très opulente, et elle n'a logiquement fait l'objet que de peu d'enregistrements. Parmi les pièces qui ont eu droit à une gravure, si l'on excepte l'émouvant "nuits d'été" pour violon et piano, celles dont l'atmosphère mélancolique, nocturne ou tourmentée justifie une chronique en nos pages, sont toutes présentes ici. Chroniquer "l'oeuvre de chambre" enregistrée de Ture Rangström sur Guts revient donc peu ou prou à chroniquer ce disque. Dans ce volume, néanmoins, les petits "capriccio amoroso" pour violon et piano et "Tre dansminiatyrer" pour deux violons sont des oeuvres qui échappent à toutes formes d'obscurité, et ne sont donc pas visées par cette chronique. Comme beaucoup de compositeurs scandinaves, le suédois n'aborde le genre que par pièces courtes. Des fragments de musique, des vignettes : même son (unique) quatuor à cordes, en un mouvement, ne fait que 13 petites minutes. Rangström s'y montre majoritairement économe, loin des prouesses techniques et des excès de notes, "Ein Nachtstück" faisant légèrement exception à cette règle. On retrouve cette franchise, la rusticité propre à l'auteur de "mitt land", dans ces atmosphères nostalgiques et rurales que le compositeur installe avec retenue et simplicité, mais aussi, et ce n'est pas paradoxal, beaucoup de délicatesse. La gravité et une intense tristesse dominent les pièces pour violon et piano. Le piano vient au compte goutte, égrainant ses accords avec lenteur et régularité comme un tic tac de pendule; "Intonation" et "Sarabande" qui constituent l'essentiel de la suite n°1, "Arioso" dont la charge émotionnelle n'a d'égale que le dépouillement du discours, "Poem", à l'humeur plus délicate et nostalgique; Rangström excelle véritablement dans ce rapport de complémentarité entre le piano triste et métronomique et la lenteur pathétique de l'archet, qui pousse chaque note au bout de son expression lacrymale, étirée, soutirée comme un aveu. Le suédois démontre ici une grande justesse tonale. La qualité des lignes de violons tient entièrement dans cette capacité à émouvoir chaque note à l'aide de sa suivante, le piano magnifiant l'impact douloureux de ces complaintes en créant un contexte harmonique d'une grande subtilité, avec ce qui semble n'être pourtant que trois fois rien. "Menuet" et "tambourin" complète la suite n°1 avec plus de pudeur, rythme plus soutenu et mélodies plus vives et dansantes, mais dont émane néanmoins une authentique mélancolie, discrètement maquillée d'élégance, et dont "Alla ballata", page maîtresse de la suite n°2 alternant tristesse nue et nostalgie courtoise, est sans doute le plus bel exemple. Bien que constellées d'instants de magie pure, les partitions pour piano seul se révèlent plus difficile à appréhender. L'écriture oscille entre cette grâce harmonique étoilée et ralentie, qui servit d'écrin au violon dans les oeuvres précitées, et une austérité brutale, presque tapageuse. La seconde "légende" souffre terriblement de ce double discours entre thème martelé sans âme véritable, et une tempérance raffinée à l'impact hélas microscopique. A l'arrivée, cette articulation centrale sans charme pèse sur "Mälarlegender" dans son ensemble, rompant l'équilibre déjà fragile mis en place dans le lento. Equilibre fragile car on y retrouve un terme cher au suédois : "improvisato". C'est bien d'errance dont il s'agit ici, errance de l'humeur, entre émerveillement enfantin et gravité serieuse, errance du touché, qui se cherche entre gouttes de pluie et accords plaqués, ces six premières minutes ne trouvant in fine leur cohérence que dans la constance délicieusement nocturne qui unie ses différentes atmosphères. Chef d'oeuvre de cette courte trilogie, l'andante nous fait regretter plus amèrement encore l'égarement de la seconde partie. Une authentique petite merveille de pondération mélancolique et cotonneuse, incrustée d'éclats harmoniques limpides et lumineux; six minutes de bonheur triste et de pureté tranquille, d'enchaînement magnifique d'accords profonds, de notes éparses et de mélodies distillées. Le constat est malheureusement plus amer concernant l'autre pièce soliste de ce recueil. Ce qui passait encore sur "improvisato" échoue dans "Improvisata". Rangström pousse de fait un peu trop loin sa volonté de signifier une forme de spontanéité, accentuant les symptômes d'hésitations rythmiques et mélodiques, hérissant un discours lent déjà suffisamment décousu de jaillissements sonores ingrats et de cascades chromatiques vaines, réduisant la magie de ses instants de pluie à moins que la portion congrue, coincés qu'ils sont entre deux emportements tourmento-romantiques, souvent un peu grossiers. Il devient finalement impossible de s'installer durablement dans l'écoute de ces sept minutes désordonnées dont le caractère chaotique et inconfortable n'est pas assez saisissant pour capter l'intérêt. Tout aussi contrasté, "Ein nachtstück" est par contre bien plus rigoureusement construit. De fait, il ne s'agit pas ici de singer les hasards de l'improvisation, mais bien d'adopter une structure qui se veut narrative, évoquant un univers dramatique et parfois fantasque. "Un nocturne à la manière d'E.T.A Hoffmann"... force est de constater que l'exercice programmatique ne s'accorde pas très bien avec la forme quatuor. Rangström ne s'en tire pourtant pas trop mal, et même, plutôt bien; si de nombreux compositeurs ont su donné à leurs quatuors une architecture et une ambition propre à la symphonie, le suédois, en quelque sorte, s'essaye lui au poème symphonique réduit au carré de cordes. Le déroulement alterne rigoureusement les passages énervés à la vélocité poussée à bout et les douceurs plaintives, le thème mélodique principal servant de liant à ces dynamiques disparates. Dès l'introduction, les parties les plus rapides rappellent sans équivoque l'orage d'été Vivaldien, avec ses staccatos impitoyables et ses accords de ténèbres, avant que Rangström ne leur imprime une évolution rythmique plus syncopée, ainsi qu'un allègement de la densité sonore, qui ont pour effet de faire glisser le discours de la furie assumée vers une sorte de suspens particulièrement tendu et d'une remarquable efficacité. La mélodie qui s'était d'abord déployée comme une déclaration théâtrale, amplifiée par la dynamique noire et tragique de l'alto et du violoncelle, prend ainsi une tournure moins tourmentée et plus émouvante; après avoir planté son décor, la pièce commence à nous raconter son histoire. C'est justement dans cette gestion des intensités, dans ces glissements savants des unes dans les autres que le suédois se montre captivant, et arrive à nous convaincre de nous laisser porter, bousculer et surprendre par le cour indocile des événements. Ces 13 minutes pleines de nuances et de rebondissements, parfaitement ponctuées par des retours réguliers à l'ardeur introductive qui agissent comme des bornes dramatiques immédiatement reconnaissables, se laissent ainsi apprivoiser à mesure des écoutes, et l'on découvre, peu à peu, la finesse de ses épisodes les plus posés. Sous ses apparences de récit d'aventure, la partition dévoile chaque fois un peu plus son caractère sentimental, les variations et ruptures se révélant autant au service de la charge émotionnelle que de la simple captation d'intérêt. Envolées mélodiques à fort pouvoir pathétique, ralentissements mélancoliques, silences inquiets ou attristés, "Ein nachtstück" passe de l'exposition d'événements agités qu'elle semble d'abord être à la chronique sensible et romanesque d'un destin qu'il nous est offert d'imaginer. Dans l'ensemble, Rangström ne démérite donc pas dans ses pièces pour effectif réduit, mais la concurrence est rude... concurrence du compositeur lui-même, qui se montre à mon sens nettement plus essentiel dans son oeuvre symphonique. Note sévère, qui rend moins compte des qualités réelles de la plupart des pièces contenues dans ce recueil, que de la fréquence avec laquelle on s'y replonge. Il émane de ces pages une simplicité mélancolique particulièrement émouvante, mais l'aspect un peu disparate et inégal de cette collection de courts moments pèse lourd sur le plaisir que l'on peut prendre à son écoute... trop lourd.

note       Publiée le lundi 3 février 2014

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