Alternative Tv › How much longer

D’abord la pochette. Pas de nom, drôle d’idée pour un 45 tours. Vue sur l’intérieur sans âme d’un minuscule salon middle-class d’une banlieue anglaise. L’antique télé projette une image du groupe. Contre le tourne-disques miteux est appuyée une pile de vyniles, au premier plan desquels a été astucieusement placé Outrageous de Kim Fowley, référence ultime de la déjante et du rien-à-foutre. On peut se demander pourquoi je ne vous cause pas d’abord de lui plutôt que de glisser un mot sur ces poseurs et copieurs d’Alternative TV. Avec eux, on est sûrs de ne pas tomber quelque chose d’original. A la fois désespérants et nécessaires par leur humour cheap désamorçant la violence du punk anglais, les Alternative TV sont un peu le fond de la corbeille, le groupe accessoire par excellence. Ne pas s’y tromper, pourtant : ces types font la transition entre un certain rock libre et décomplexé des années 60 et les scènes underground des années 80, qui se nourriront parfois plus qu’on ne le croit du punk anglais.
L’inatteignable aristocratie anglaise est ici à l’œuvre dans toute sa splendeur : Mark Perry, le chanteur et leader, avait conçu le groupe comme un prolongement de son fanzine Sniffin’ Glue, dont le dernier numéro contenait un flexi-disc d’Alternative TV. Bientôt rejoint par Alex Ferguson, futur Psychic TV, le groupe enregistre ce 2ème single affligeant de nullité mais à la roublardise palpable (et attendez de voir The Image has Cracked, le premier album…) C’est plus l’appropriation, par les gamins, du média disque et de la culture rock’n’roll par tout les moyens que la musique qui est intéressante dans ce genre de « groupe », qui n’en est pas un, puisqu’une vingtaine de membres y transiteront durant son erratique existence, dont Bob Leith des Cardiacs ! Alternative TV, l’air de rien, étaient des idéalistes, des guérilleros de la première vague punk qui croyaient qu’une grosse dose de culot et d’excellents goûts de gourmet (sur The Image Has Cracked, le fameux premier lp, on voit Mark Perry allongé au milieu de ses Zappa, Love, Beefheart, Who et Neil Young) suffiraient à changer le rock. Ils avaient raison, ils l’ont changé. Mais pour le pire, et presque tous se sont séparés avant d’en assister à la déchéance…