Il n’y a rien de mal à se faire du bien; c’est ce qu’il se disait après s’être masturbé convulsivement la moitié de l’après-midi pluvieux. Les sens en alerte, une pulsion primale grondant au fond de son être, il perçoit soudain une rythmique primitive, claquante, vite nappée d’un mur de guitare. Un son déjà entendu, la marque de fabrique d’une formation au nom étrange; des guerriers ceux-là, avec leur goth rock furieux tissant un sépulcre électrique autour d’un chant caverneux… Sauf que justement, le chant est moins caverneux. Musicalement, la production lourde et réverbérée as fuck (qui inspirera notamment les Américains de The Wake) est bien en place, le feeling obscur distillé par la musique emplit la pièce, pourtant son membre flasque peine à se durcir… Qu’arrive-t-il ? Pourquoi la magie noire n’exerce plus son pouvoir revigorant ? Parce que si la formule est connue, qu’elle dégage toujours des sortilèges puissants, elle se distille pourtant déjà. Moins de mélodies marquantes, un timbre moins sépulcral, un imperceptible moins aussi au niveau de l’intensité du jeu, Red Lorry Yellow Lorry ont posé le premier pas en direction de la chute sans faillir pourtant. Il faut connaître à fond les deux premiers albums pour le comprendre. Parce que franchement, à l’écoute du fantastique et grinçant ‘Sayonara’, du bon ‘World around’, il sent bien la sève gonfler son sexe turgescent. Difficile pourtant de nier que ‘Nothing wrong’ est un single correct mais pas exceptionnel, que beaucoup de ces structures ont été proposées en mieux sur les opus précédents, que l’album sonne un tantinet longuet… Le groupe s’essouffle progressivement mais ne baisse ni les bras ni les armes permettant à ‘Nothing wrong’ de demeurer un bon disque figurant à ce titre dans la chaudement recommandée box ‘Albums and singles 1982-89’, contrairement aux deux disques suivants. Et de toute manière, selon Saint Paul dans sa deuxième lettre aux Corinthiens: ‘Il m’a été donné le " stimulus carnis " (l’aiguillon de la chair). Trois fois j’ai prié le Seigneur de m’en délivrer… ‘ donc un bon catholique n’écoute pas Red Lorry Yellow Lorry.