Hínn Íslenzki þursaflokkur og Caput › Í Höllinni á þorra 2008

Salauds d'Islandais ! Non mais franchement, c'est quoi votre problème ? Vous pensez que nos petites oreilles du Continent ne sont pas dignes de se poser sur votre musique, vous pensez que nous ne comprendrions pas toutes ses nuances, sa beauté ? Déjà qu'on rame comme des fous en dépensant des sommes folles pour se procurer des artistes sombres de votre pays...Et même lors d'événements tels que celui-ci, vous ne pensez pas un instant à nous !?! Pour fêter les trente ans de sa création, le groupe progressif Hinn Íslenski þursaflokkur (également connu sous le nom de þursaflokkurinn) s'allie à l'orchestre classique Caput pour une tournée dans son pays, événement immortalisé au travers de ce splendide objet proposant un cd et un DVD dans un emballage grand luxe. Impossible de vous donner plus de détails, le livret étant entièrement en islandais (quand je vous dis que ces gens-là ne sont que des égoïstes). Vu la popularité du groupe sur son île, l'événement fut célébré en grande pompe et le résultat est époustouflant; il est toujours à craindre lorsqu'une formation progressive s'adjoint les services de musiciens classiques de sombrer dans le pompier mais ce n'est nullement le cas ici, l'équilibre entre l'acoustique et l'électrique est parfait et la présence de l'orchestre permet de donner plus de forces aux compositions. L'album démarre assez fort avec quelques-unes des chansons flamboyantes telles que 'Búnaðarbálkur' proprement magistrale et prend le spectateur dans une ambiance étrange oscillant entre paysages cinématographiques, comédie musicale, rock...Il y a dans les notes et les accords l'amplitude que l'on trouve dans les étendues de l'île que ce soit dans le sentiment d'espace, la tempête sur les falaises (l'excellent 'Æri-Tobbi', ses volutes de guitares, ses tourments de cuivre) ou même les tours que jouent les gobelins aux habitants apeurés. Pas de structures linéaires mais des partitions en vagues, tour à tour flamboyantes, ironiques, cassées, rapides, saccadées, pareil pour le chant. Au fur et à mesure que le concert progresse, l'aspect purement musique de film cède le pas à des pièces plus directes, graves, parfois presque mystiques, limite mélancoliques par instant ('Grafskript' et son début à la Dead can Dance)...Des échos lointains de Gentle Giant, Pink Floyd, affleurent discrètement avant de se fondre dans les lignes néoclassiques...Le chant de Egill Ólafsson sonne de manière toujours plus captivante ('Vill einhver elska...?', l'excellent 'Nú er heima ! (Ein Mann)' croisant influences jazzy et clavier faussement oriental). Le passage le plus intense émotionnellement reste pour moi 'Bannfæring' qui glisse de percussions quasi tribales à un final funèbre sur fond d'orgue, de carillon et de vocaux psalmodiant 'Kyrie Eleison' dans une ambiance de requiem...Ca devait être quelque chose dans la salle. Malgré la diversité des ambiances, l'album reste un tout très cohérent, comme une fresque de la vie avec ses peines et ses joies. Il faut dire que la qualité vraiment excellente du son permet de jouir pleinement de chaque nuance. Si le cd propose seize pistes, le DVD en livre six de plus...Salauds d'Islandais ! De quel droit rendez-vous ce genre de trésor si difficilement accessibles ? Nous avons droit à autre chose que Björk, Gus Gus ou Sigúr Rós, non ? A moins que telle beauté ne doive se mériter, comme votre île qui ne se laisse pas si aisément apprivoiser ? La récompense n'est est que plus belle...De toute manière, salauds ou pas, je vous adore et ce groupe, son disque, vous font honneur et si vous pouviez vous arranger pour qu'ils soient mieux distribués de par chez nous...