Ruo Tán › Stone

Pour cette ballade-ci, psychique ou réelle, il vous faut des montagnes avec des forêts de pin, de la nuit noire, des silhouettes en ombres chinoises, de la brume, de l’encens, des ruines de monastères, des spectres, un croissant de lune, des… ’Stone’ pourrait bien être la B.O. parfaite des contes de fantôme japonais qu’on m’a lus enfant sauf que là, c’est du côté de la Chine que ça se passe. Voyage initiatique ? Légende à glacer le sang ? Cérémonie shamanique ? Qu’importe, voilà belle lurette que je n’avais entendu un album dark ambient d’une telle qualité. ‘Blood’, courte pièce, débute en douceur par un simple rythme de percussions, comme pour préparer le pèlerin. C’est avec ‘Mist’ que le musicien chinois Ruò Tán va dévoiler tout son talent. Son travail évoque l’obscurité et ses mystères, la nature mystique, une spiritualité intense parfois effrayante faite musique. Bruissements, nappes, percussions, drones, grincements, l’homme maîtrise, dose, avec une précision d’orfèvre, installe une atmosphère, laisse monter la pression, avec un naturel presque effrayant. S’ajoutent des grognements, imprécations, toujours au bon volume, sans empressement superflu. Les yeux fermés, dans le noir, parmi les brumes d’encens, il n’est pas difficile d’imaginer la silhouette d’un temple perdu parmi les arbres, des statues bouddhiques parmi les fougères, le brouillard rampant le long des corniches… Mais d’où viennent ces voix ? D’ici ? De l’autre monde ? ‘Soil’, plus âpre dans ses sonorités, apportera peut-être une réponse… Mais y a-t-il réellement besoin d’en chercher ? Le pouvoir de cette musique ne suffit-il pas ? Une œuvre remarquable.