Demdike Stare › Tryptych

Demdike Stare, le temps que je mette à vous en parler, c'est déjà démodé. Je vous parle du passage de la décennie, là ; du temps où les triangles étaient encore "in" (on en est à la croix en X avec les lettres autour, suivez un peu), où Prurient se mettait à la techno (correction – où TOUT LE MONDE se mettait à la techno) ; bref où tout et n'importe quoi allaient devenir la norme. Et puis donc, Modern Love, Demdike Stare et l'occultisme vendu comme le nouveau gadget hipster. "Non mais attends, tu comprends rien, c'est le renouveau dub-techno le plus foisonnant depuis Basic Channel..." Mais là n'est pas le problème, chère voix intérieure – le problème c'est que j'ai déjà entendu absolument tous les sons qui circulent le long de ces trois Cds ; qu'ils s'appellent Archon Satani, Muslimgauze, No Festival Of Light, Rapoon voire Nathan Siter (son unique album Exosphere est une merveille mais pas de bol, c'est pas sorti sur un label hype donc tout le monde s'en fiche). Je ne vais pas prolonger ma liste, mais voilà : j'aimais encore bien leur premier album 'Symbiosis' dont je vous parlerai si l'envie de le reprendre en bibliothèque me revient car il avait le mérite de s'affirmer comme un tout qui à défaut d'être original avait au moins le mérite d'être cohérent et, quitte à se vendre comme du dub, d'avoir des basses et des drones généreux. Mais là, réunis dans un seul coffret, les trois albums suivants se suivent et se ressemblent. Ils ont leurs moments – et encore heureux, sur presque trois heures de musique – mais les idées, paradoxalement, s'entassent ; j'entends de plus une distanciation avec le sujet qui n'a pour effet que de m'irriter : et ce n'est pas ici qu'une affaire de mode ou de style mais d'un manque d'investissement personnel avec un sujet qui l'est fondamentalement (je parle du domaine spirituel, au cas où vous auriez déjà décroché). Tiens, pour rester dans un style très proche, je vous proposerai bien volontiers aussi le Natures Mortes de Phallus Dei, tout aussi profond et infiniment plus investi. Réduit à sa coquille vide, j'entends ici la musique le cul entre deux chaises ; formellement trop timide pour ne s'accomoder que d'elle-même (si vous voulez un bon exemple dans ce genre, je vous conseille Shackleton, Echospace et/ou cv313) et thématiquement trop vague pour soutenir le propos. Reste un bel objet, et des jolis sons. Quant à trouver la vibration intérieure, reportez-vous plutôt au name-dropping que vous venez de subir.