Triste pochette en vérité, au moins l’une des jeunes femmes (peut-être les deux mais ma mémoire peut me jouer des tours) l’ornant serait décédée quelque temps après. Maigre consolation mais ce disque est selon moi le meilleur des Belges; leur approche old school de mélange de goth rock et de dark wave électronique y est maitrisée comme jamais. C’est toute l’audace des Neon Judgement, Poésie Noire, Conspiracy of State (‘Faith healer’ les évoquent beaucoup) que l’on retrouve ici mais exprimée de manière plus directe. Ces textures noires, épaisses, les beats dansants, les guitares lancinantes, le chant grave qui se place majestueusement, secondé par des choeurs tragiques… Mais y réduire les compositions serait négliger les leçons de la cold wave dont le combo sait aussi se servir au besoin (le plus recueilli ‘Unexpected’). Facile de comparer encore et encore, toujours est-il que ce pot-pourri débouche sur une version fraîche et régénératrice du goth rock. C’est moins froid et désossé, plus ample, que l’école britannique, avec en filigrane la misère sociale de certaines régions de Belgique. La musique de Der Klinke évoque davantage les ruines d’usines, les friches industrielles que les cimetières ou les vitraux des chapelles sans renoncer à une forme de spiritualité pragmatique pour autant. Surtout, les Belges sont extrêmement cohérents tout au long de l’album, l’aspect mélodique, la production n’en sont que mieux mis en valeur. Aucun déchet et nombre de tueries sont au programme: le fabuleux ‘The river white’ (essayez seulement de résister à ça sur une piste de danse), le discret ‘My Frozen heart’ avec son thème de clavier irrésistible, ‘Faith healer’ et j’en passe. C’est original, puissant, sombre avec une atmosphère particulière, durable; même le piano froid final apporte une touche de neige pour saupoudrer de blanc l’obscurité opaque et jouissive de ce disque. Est-ce cela l'inattendu ?