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Antonin Dvorak (1841-1904) › Concerto pour violoncelle et orchestre en si mineur, Op.104
- 1998 • Deutsche grammophon 459 193-2 • 1 CD digipack
cd • 3 titres • 78:40 min
- Concerto pour violoncelle et orchestre en si mineur, Op.144 (1895) | 38:17
- 11.Allegro14:43
- 22.Adagio ma non troppo11:24
- 33.Finale : allegro moderato12:20
- Symphonie n°8 en sol majeur, Op.88
informations
J'ai découvert l'oeuvre par cette version que je trouve par ailleurs magnifique. Pierre Fournier était un des plus grands violoncellistes de sa génération, et George Szell un chef brilliant, dont les plus grands éclats ont souvent rivalisé avec ceux de ses confrères les plus mythiques. Philharmonique de Berlin : ça joue plutôt correctement, donc. Rostropovitch en a gravé deux versions, je ne connais que celle avec Giulini, qui est inévitablement somptueuse (emi classics). J'ai aussi pu jeté une oreille sur celle de Jacqueline Dupré avec Celibidache, dont le mariage est... curieux, dirons nous. J'avoue, néanmoins, malgré Rostropovitch et le très grand Carlo Maria, que je reste fidèle à mon Fournier/Szell, plus chatoyant.
line up
Pierre Fournier (violoncelle); Orchestre philharmonique de Berlin; George Szell (direction)
chronique
- musique concertante/romantique
J'adore le hautbois. Ceux qui me font l'honneur de me lire ont déjà pu
noter que je ne rate jamais une occasion d'insister sur le rôle
essentiel que la plupart des compositeurs lui font jouer; l'instrument
est de fait considéré comme le deuxième héros de l'orchestre, après le
violon. Mais s'il est un instrument dont le chant si particulier
rivalise dans mes modestes oreilles avec celui de son frère de la
famille des bois, c'est bien la clarinette. Dvorak en fait ici un
usage protagoniste : c'est elle qui dévoile le thème principal, sombre
et sévère, en ouverture de la pièce, c'est encore elle qui va baigner
de son acoustique ronde et nocturne tout le déroulement du nostalgique
adagio. C'est avec elle que le soliste dialogue tout au long du
finale, dans sa lumière étrange qu'il va exprimer ses plus marquantes
mélodies. Mais nous sommes là pour parler de violoncelle, et
d'orchestre. Bien plus que celui de Schumann, le concerto pour
violoncelle du compositeur tchèque est en effet une incarnation
littérale de la notion de concerto pour "soliste ET orchestre". Et
quel orchestre! Car l'oeuvre est aussi marquante par ses puissances
orchestrales phénoménales, que par une partition soliste au comble de
l'expressivité. C'est une véritable symphonie avec soliste, une
symphonie telle que la pratiquait Dvorak : particulièrement dynamique,
contrastée, aux accès sonores d'une intensité qui frise la violence,
aux thèmes éclatants, saisissants, et dont les régulières percées de
joie et de lumière se font engloutir sous le flot proprement océanique
des ténèbres mélodiques de cuivres titanesques. Rien, pas même
l'adagio, ne résiste aux fureurs cumulées des cordes et des
trombones; l'oeuvre est un tourbillon de mélodies et de timbres
chatoyants, une orgie d'émotions. Et Dvorak le sait, lui le coloriste,
le généreux : un orchestre c'est aussi, et peut-être avant tout, une
gigantesque palette, de formidables miscellanées de teintes et de sons,
dans lequel le compositeur va aller chercher tous les détails précieux
qui vont accompagner les voyages du soliste. Le violoncelle est
rarement seul, de fait, et quand il l'est : attention aux yeux qui
piquent. Pulsation des cordes légères, soutien du cor, marches de
contrebasse, dialogues avec les flûtes, vols de violons sauvages,
atmosphères de bassons : ce sont des trios avec violoncelle, des
sonates, des quatuors et des quintettes, où le soliste dirige de sa
voix principale les humeurs et les angles, les lentes plaintes
douloureuses. Virtuose évidemment, le soliste joue avec ses soutiens à
l'inversion des rôles, devenant atmosphérique en vibrations nuages
tandis que la clarinette reprend la mélodie pour varier les couleurs
et les zones de densité : c'est dans les permutations secrètes du
rythme et des mélodies d'un instrument à l'autre dans les parties
solistes que le maître Antonin fabrique en souterrain ses creux et ses
tensions, amenant peu à peu ses entretiens à quatre sur les routes
symphoniques de l'orchestre. Redisons le : Dvorak était un mélodiste
génial à l'inspiration particulièrement féconde; tout ceci n'est que
tournures, harmonies et lignes exemplaires, et si le violoncelle tient
souvent le devant de la scène de sa voix essentielle, chaque mouvement
d'arrière plan est aussi une mélodie superbe, une fleur ou un jardin.
Ecoutez la tristesse sublime du soliste lorsqu'il sort de l'orchestre
au début de l'adagio : la qualité formelle et émotionnelle de cette
ligne, la force de son expression... et la beauté limpide de la flûte
qui vient finalement l'accompagner. Chaque épisode d'orchestre est une
histoire captivante tant la force de son thème, sa prégnance, l'impose
à l'auditeur. Un mélodiste génial, à l'inspiration particulièrement
féconde, et d'une générosité unique. Oeuvre de l'ultime maturité,
moins souillée par la gloire que la 9ème symphonie, imprégnée de la
Bohême et de ses mélodies, le concerto pour violoncelle est à mon sens
l'oeuvre la plus caractéristique, la plus représentative du grand
Dvorak. Prince des thèmes, immense symphoniste, sorcier des contrastes
et général du rythme, merveilleux chambriste (procurez-vous
l'intégrale de ses trios, c'est un rien plus décoratif, mais tout
aussi beau que ceux de Schubert), Dvorak trouve dans cette forme, qui
allie le symphonisme le plus éclatant aux passages les plus
intimistes, la plus pleine occasion d'exprimer toute l'étendue de son
génie. Le chef-d'oeuvre d'un des plus grands maîtres du romantisme,
passionné, secret, multicolore et généreux.
note Publiée le samedi 23 janvier 2010
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- ellington › Envoyez un message privé àellington
Dvorak n'est pas Mahler , mais enfin ...
( J'interrompt ma phrase pour que vous compreniez bien ce qui vient d'être dit : 1) je parasite ma phrase par une négation qui relative l'excellence de l'objet 2) la référence à Mahler induit malgré tout un certain niveau de qualité 3 ) la comparaison sous-entend une familiarité stylistique qui aide le lecteur à situer l'oeuvre ).
Trois idées dans une demi-phrase , il fallait quand même le souligner ... MAIS enfin , disais-je , cette symphonie est bien agréable à écouter
- NevrOp4th › Envoyez un message privé àNevrOp4th
Chronique qui viens à point nommé, je découvre ce compositeur en ce moment et c'est tous simplement grandiose. Une musique qui me fout les frissons. Merci.