Un grand pays, La Russie, même si on n'est plus à l'époque de l'U.R.S.S., un pays où l'écart entre les villes en plein essor technologique et démographique et les campagnes dont certains villages reculés n'ont ni électricité ni bitume est grand. Un pays en crise également où l'apparente démocratie est sans cesse questionnée par la censure et la répression du gouvernement. La vie en province, les jeunes gens de Breathing of Bones, ont connu, c'est pour ça que le chanteur a émigré à Saint-Pétersbourg dès qu'il l'a pu. Créer et maintenir une formation deathrock si loin des structures d'une grande ville n'a pas été une chose aisée malgré les échos récoltés via Myspace. Grâce au soutien de l'équipe de Manic Depression et de Pall Nattsol (ex-Grotesque Sexuality et créateur du webzine Grave Jibes), le fruit de ce travail nous parvient aujourd'hui sous forme d'un cd de huit titres. Très vite, le ton est donné, un carillon lugubre tinte dans le lointain avant que n'éclate la musique, une musique torturée et grinçante inspirée par Christian Death, Shadow Project, Martyr Whore et autres formations deathrock, tant dans la musique que le chant, avec cependant une petite touche de colère typiquement punk se traduisant notamment dans les textes (le groupe reconnaît également volontiers UK Decay ou Crass parmi ses influences). J'avoue qu'après avoir suivi la genèse du projet via le net, j'ai été bluffé par le travail accompli depuis. Cet album est excellent, inspiré, plein de fougue et de désespoir. Vadim Barsov (actuellement chanteur de Salome's Dance aux côtés de Pall Nattsol justement) sait moduler sa voix pour varier la palette émotionnelle avec des tessitures qui ne sont pas sans évoquer Rozz Williams jeune. Les riffs sont efficaces, les musiciens enchaînent adroitement passages lourds et étouffants et accélérations assurant une bonne cohérence au sein des chansons. Nos jeunes Russes s'offrent même une bonne reprise, torturée à souhait, du 'Winter' de Amebix. Huit titres, ce n'est pas beaucoup, mais ils sont tous d'excellente facture, comme si le combo avait concentré tout son savoir-faire dedans et le résultat est des plus abouti. Il est clair que si Breathing of Bones n'avait pas splitté depuis, ils auraient eu largement de quoi défier les formations deathrock américaine sur leur propre terrain.