Fusiller › Des Chiens En Guise De Bras

Fusiller, c'est Jo, le taulier de Tanzprocesz, et accessoirement moitié du génial duo Opéra Mort. Tout est dit ? Presque. En tout cas, on devine bien où on met les pieds : dans ce noise électronique, tordu et improvisé, où les flatulences connaissent par cœur leur grammaire post-industrielle autant qu'un certain détachement désinvolte. N'allez pas imaginer quelque pet de branleur en manque de provocation bruyante, mais bien la manifestation directe d'une maturité décomplexée qui ne s'embarrasse ni de justification, ni de conceptualisation. Et si je parle de maturité, c'est qu'il me semble que si notre homme connaît parfaitement les codes de certains courants musicaux (punk, indus, noise), c'est pour mieux se les approprier dans une mixture reconnaissable entre mille. Ou comment réinventer la noise, à une époque où l'on pense, blasé, avoir tout inventé, tout entendu. Là, l'univers tient de «Gummo» ; en tout cas c'est l'idée que je m'en fais, imaginant cette anti-musique raconter la vie, bête et méchante, du cocon familial, entre les névroses, les non-dits, les anecdotes truculentes qu'on se remémore à la fin des tablées dominicales ; de ces secrets douloureux qu'on devine larvés derrière les instants figés des films super 8 et des photos de famille ; de cet apprentissage de la vie, sans concession, cruel souvent, intolérant parfois, où l'on se bat comme on respire. On y rit toutefois à pleines dents, parce qu'on aime la vie, parce qu'on aime les siens, tout simplement. (4,5/6)