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Jennifer Terran › The Musician

cd • 14 titres • 60:43 min

  • 1Liberty Lunch06:27
  • 2The Painter04:07
  • 3This Recording04:53
  • 4Mad Magdalene07:12
  • 5Sweet Love05:02
  • 6Sounding A Simple Chord02:28
  • 7Emotional Laxatives04:24
  • 8Skating03:51
  • 9Sticky Sweet 8 to 5 Lady03:30
  • 10Unconditionnal Love04:55
  • 11Grand Canyon05:33
  • 12Santa's Secret04:16
  • 13Magdaline Try!03:36
  • 14Rewind00:30

informations

Produit, enregistré et mixé par Jennifer Terran

http://jenniferterran.bandcamp.com/album/the-musician-2

line up

Jennifer Terran (chant, piano, percussions, harpe, flute), Brendan Statom (contrebasse, basse nylon), Laura Hextine (violon), Misha Bodnar (violoncelle), Laura Mihalka (violoncelle), Kyan Wnuck (batterie), Chris Judge (guitare), Tom Lackner (batterie), Tony Terran (trompette)

chronique

  • chamber pop pour monde intérieur

Une femme nue assise devant son piano, un titre tout ce qu'il y a de plus concis : The Musician. Comme accroche, difficile de faire plus clair. Jennifer Terran est une musicienne, ce qui n'a rien à voir avec une quelconque industrie du disque. Pas son truc le cirque, elle enregistre chez elle, dans son propre home-studio quelque part en Californie, utilise sa propre structure pour produire ses albums, donne des concerts privés au coeur même de son intimité. L'indépendance puissance mille. C'est tout ce qui fait la matière de cet album, un peu conceptuel dans le fond, qui ne traite que de ça, une musicienne mise à nue. Alors j'en vois venir de loin, une américaine, un piano, les amateurs de cheat-codes critiques verront une comparaison pratique à faire. L'idée effleure l'esprit mais s'évanouit aussi vite tellement la personnalité singulière de Terran immerge totalement sa musique, donc oublions les rousses un moment (autant que faire se peut). Sans intermédiaire autre que celui du support, Terran s'adresse directement à son auditeur dans d'étranges zones cachées entre les pistes, audibles seulement lors d'une écoute intégrale, refusant d'avance la segmentation et le zapping auditif de la génération mp3. Une voix précieuse, un pur faisceau de lumière, aux derniers souffles un peu voilés la rendant d'autant plus sensuelle, une tessiture qui attaque directement la moelle épinière, provoquant des vagues régulières de frissons irrépressibles. L'effet de sidération cloue au sol dès l'entrée en matière, "Liberty Lunch" et son lent crescendo de mélodie automnale triste à pleurer, les cordes et les harmonie vocales rejoignant bientôt le piano/voix dans le silence pour les porter aux nues, l'intimité du studio n'empêchant pas le grandiose de survenir à tout moment. Bien sûr le concept en forme de profession de foi peut paraître un peu austère à première vue, tout y passe : la vertu cathartique de la création, l'intervalle anxieux entre l'enregistrement par le musicien et l'écoute par son auditeur, la volonté farouche de garder le cap plutôt que de devenir esclave d'une vie non choisie, la fidélité à son amour et les sacrifices qu'elle nécessite, le plaisir simple et évident de jouer de son instrument. Mais le sentiment de proximité qui se crée avec la chanteuse, cette intimité quasiment sensitive fait tout le trouble de l'expérience. Terran développe une multiplicité d'ambiances et d'arrangements, avec un penchant pour l'atmosphérique mélancolique, ritournelles de piano comme un sac et ressac, sa propre voix en échos de mélopées, quelque trompette élégante sur l'hivernal "Skating", une rythmique de handclaps et le surgissement de cordes balkaniques sur l'oriental "Sticky Sweet 8 to 5 Lady", une guitare acoustique et une basse nylon délicates qui prennent par la main la coda vocale ensorcelée d'"Emotional Laxatives", le dédoublement en choeur gospel sur un "Sweet Love" joueur et solaire. Une musique très américaine au fond, dans laquelle on perçoit de façon assez ténue, en creux, le jazz, la soul, même le hip-hop (dont Terran fut aussi un temps professeur de danse). Une musique de l'Amérique côté peuple, l'Amérique concrète des gens qui se démerdent comme ils peuvent avec le grand capital et une vie de désirs avortés. Jennifer, elle, a trouvé sa solution propre, l'indépendance, qu'elle clame dans une allégorie tragique et revancharde, "Mad Magdalene" : la musicienne, ignorée, méprisée par un col blanc de l'industrie qui lui parle radios commerciales et retours sur investissement, prend une mesure drastique : "There's more music that what you hear on the fucking radio you ignorant bastard! (…)She warned you Mr. Recordman." et pan, entre les deux yeux. Nue mais pas désarmée, comme on la voit dans le livret, (dé)vêtue d'une simple paire de bottes et d'un flingue, these boots are made for walking all over you, fucking prick ! L'Amérique des hommes et celle des paysages, en scope, l'immensité d'un espace dans lequel on peut s'oublier, se jeter quand le coeur lâche, "Grand Canyon", morceau aérien et douloureux, digne de la vision lunaire qu'il évoque, où la voix de Terran semble se perdre dans l'éther au dessus de formations érodées balayées par des courants d'air ennivrants, sans doute le morceau le plus beau d'un l'album qui se termine avec Jennifer sussurant littéralement dans l'oreille de l'auditeur, une présence plus tangible que jamais. Voici donc un des secrets les mieux gardés du genre, caché au coeur des collines de Santa Barbara, une femme à la conviction sans faille qui assure que si "l'industrie du disque ne peut exister sans le musicien, le musicien peut exister sans l'industrie du disque". Elle le démontre, pour concocter un tel objet rare, elle n'a eu besoin de personne.

note       Publiée le samedi 6 octobre 2012

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    Khyber Envoyez un message privé àKhyber

    De très belles choses sur ce disque; une musique sincère et sans apparats. Il tourne régulièrement!

    Note donnée au disque :       
    sebcircus Envoyez un message privé àsebcircus

    Tout ça m'a l'air bien intéressant, je vais écouter cet album.