Die Form › Best of XXX

"Pérennité", écrivais-je au sujet de Die Form dans ma chronique de Noir Magnétique : pour n'importe quel projet musical, fêter ses trente ans est déjà une prouesse mais dans un genre aussi tordu et avec une telle régularité, cela relève du miracle. En 2008, Die Form se revisite et réenregistre, remixe, approfondit vingt-huit de ses plus gros classiques (la tracklist parle d'elle-même) et nous les sert dans des versions simplement rafraîchies voire complètement transformées ('Automatic Love') pour approcher le style moderne et percutant de Noir Magnétique. Adieu donc percussions arides et production faiblarde, et place à un groupe dépoussiéré et prêt à replanter ses racines dans le nouveau millénaire. Cependant, il y a un hic. Le coffret en soi a une sacrée gueule, la sélection est grandiose pour tout néophyte et l'imagerie est à la hauteur ; mais toutes les nouvelles versions ne sont pas du même acabit ou, plus exactement, elles le sont toutes tandis que les originaux s'avéraient bien plus variés. Pour la plupart des titres, seuls quelques effets et ajouts discrets ont apparu mais c'est surtout la voix d'Eliane, ici presque omniprésente, qui me pose problème. Pourquoi avoir gâché la sécheresse toute perverse de 'Chronovision' et surtout 'Slavesex' avec cette voix d'opéra hors de propos ? À chacun son rôle, voyons ; si le dominant se met à faire le dos rond, où va-t-on ? Sur plusieurs autres titres, les modifications sont si petites qu'elles en deviennent dispensables ; mais elles ont l'avantage de ne pas défigurer le titre de trop. Je ne boude pas mon plaisir cependant mais pour une compilation destinée aux curieux qui voudraient se lancer dans la découverte du groupe, le terme "best of" peut s'avérer un peu réducteur, et l'ensemble gagne surtout en cohérence ce qu'il pert en fidélité. Pour autant, la plupart des titres sont très bons, du plus gothique (intense 'Martyrium', inévitable 'Cantique') au plus rentre-dedans (le premier CD, véritable usine à tubes). D'autres profitent tout à fait de ce rafraîchissement ('Doctor X') gagnant en subtilité ce qu'ils auraient pu perdre à la lumière d'une production plus claire. Pour peu que l'on se fasse à l'idée d'oublier tout ce qui s'est passé avant l'arrivée d'Eliane au chant (ce qui n'est pas un reproche en soi, juste que cela peut lasser sur presque trois heures d'affilée), Best of XXX reste une porte d'entrée on ne peut plus valable et dont le défaut fait aussi sa qualité puisque tous les versions présentées ici sont inédites et se justifient finalement autant pour les connaisseurs que pour les nouveaux venus. 4,5/6