Prop › Small craft rough sea

Et si un peu d'air marin venait balayer nos certitudes ? Et si un pays aussi éloigné que l'Australie se montrait capable d'élever le débat au-delà de toutes espérances ? Prop est un groupe inclassable à la base, mais son esthétique - et l'époque qui l'a vu naître - en font d'emblée une antépénultième déclinaison de ce post rock qui désormais ne surprend plus. Pas de violoncelle grimaçant l'instant fatidique pour autant ; non, le discours de Prop est avant tout rythmique. Vibraphone et marimba se chamaillent sur tous les titres, dans un chassé croisé qui partagerait une lointaine parenté avec les travaux de Steve Reich. Une basse et une batterie consolident encore l'aplomb du quintette. Effet rythmique qui aurait pu être redondant si ces derniers n'avaient tout simplement pas choisis de se cantonner uniquement au rôle de métronome, permettant ainsi aux éléments solistes de tournoyer autour de cet axe en parfaits contrepoints. A rapprocher sans aucun doute de Mice Parade ou The Mercury Program, voire Tortoise. De subtiles nappes de clavier viennent par intermittence déposer une petite brise un peu retro, entre musique planante d'hier (Tangerine Dream) et musique néo-psychédélique d'aujourd'hui (Ozric tentacles). Si toutefois c'eut été possible, Prop fait montre d'une plus grande générosité encore en transformant chacune de leurs pièces en autant de filons à exploiter, en autant de pistes à explorer. Ainsi, passe-t-on de l'introspectif "Nebula" aux mélodies presque néo progressives de "Mount Zero", des abstractions éléctroniques deephouse de "Care for Them" aux beats fusion de "Solo Trip", des timides fragrances world de "Landing" au jazz minimal de "Sirius". Même le côté psychotrope et répétitif de Can trouve de quoi faire son nid sur la longue exposition en deux thèmes distincts, "Magnetic Highway/Remora". Contemplatif et délicat, "Small Craft Rough Sea" rend les séances d'hypnose collectives enfin accessibles à toutes et à tous.