Stephen Parsick › Cryotainer- Music for Gasometers

Le monde musical et la créativité artistique de Stephen Parsick sont très progressifs et aventureux. J’oserais même dire; au delà du conventionnel et des normes établies par des artistes tout aussi avant-gardistes. Le synthésiste Allemand ne craint pas les défis artistiques, poussant les limites de l’imagination et de la conception culturelle aussi loin que l’imaginaire peut le permettre. Après cela, j’imagine que c’est nous entrons dans une autre dimension. Cryotainer- Music for Gasometers est un autre audacieux projet musical sombre où peu d’artistes auraient osé relever pareil défi. Un concert dans une usine de contenants d’essence abandonnée et désaffectée, avec une température de 6 degré Celsius. Il en résulte à une musique qui dépeint à merveille les ambiances d’une température glaciale dans un monde de tôle et d’acier, dont Parsick dépeint avec une froide noirceur les ambiances industrielles d’une usine fantôme. Un chantier qui a vu des hommes tomber et des hommes s’écorcher pour gagner un semblant de vie.
Une musique sombre, empreinte de gaz sidérurgique émanant des vestiges fantomesques d’une usine délabrée. Une froideur enveloppée de doux mouvements synthétisés, comme une lente symphonie agonisante sur la terminalité d’un monde prolétarien abusé et dévêtu de pouvoir. Et c’est pas parce que c’est sombre, noir et ambiant que ça ne vaut pas l’oreille. Bien au contraire. L’histoire de la conception artistique aidant, on suit à merveille l’odyssée métallurgique de son auteur. Idophonic Ambience nous trempe dans l’aciérie par une approche très réaliste avec ses gouttes d’eau éparses qui suintent ici et là, enveloppées d’une fine onde synthétisée. Une onde qui n’emprisonne pas les chuchotements pieux d’un auditoire hardie et conquit qui entend cette lente ondulation sonore s’amplifier avec une lourdeur oblongue sur Density and Pressure. Un titre aux envolées métallisées sur des bruits fantômes d’une usine abandonnée, mais dont l’âme persiste aux travers maints ébullitions et échappements gaziers. Tout au long Stephen Parsick surdimesionne la vétusté de ces lieux désaffectés avec une approche parfois dramatique, parfois silencieuse, mais très réaliste d’un univers en perdition. De lentes réverbérations s’enroulent et se déroulent dans une sphère glaciale que Parsick parvient à réchauffer avec de belles strates synthétisées qui enveloppent, tel un manteau, une froideur autant réelle que fictive. À ce niveau, Lightwave et Natchmusik sont superbes. Plus lourd et clairsemé d’étranges percussions surréalistes, Dark Gamelans ulule la souffrance d’un chantier gazier dont l’histoire reste secrètement partagée par les ouvriers partis on ne sait où. Une approche dramatique sur gros synthé tonitruant aux souffles linéaires et aux résonnances tactiles qui retrouvent une chaleur plus humaine sur la pièce titre. Alors que Cold Burning projette les seuls mouvements tempétueux et animés avec de lourds claquements, comme le bruit des marteaux et des masses qui déforment le métal en feuille. Un lourd héritage d’ouvrier qui se termine dans les cendres brumeuses de Luminous Gas.
Audacieusement atonal, mais non dépourvu d’âme, Cryotainer- Music for Gasometers est un album à l’image de la complexité du personnage qu’est Stephen Parsick. Un album sombre et froid, mais avec de belles envolées chaleureuses qui jettent un peu de soleil sur ce qui reste d’humanité dans un monde métallurgique.