Cataplus › Tuohiparta

Lorsqu'on était enfant et que le merveilleux était dans chaque objet, même le plus banal, et l'horreur derrière chaque porte entrouverte, la forêt possédait quelque chose de magique, et l'on se bornait à ignorer sa domestication pour voir en chaque maigre bois de bord d'autoroute le territoire sans fin des contes, derrière chaque arbre duquel faune surnaturelle et créatures du Bon Peuple disparaissaient, on en était sûr, à l'instant où on tournait le regard vers eux. Tuohiparta ravive ce sentiment comme on découvre les braises en remuant les cendres d'un feu. Les infimes clochettes qui tintent ici et là n'en sont que les étincelles qui s'en échappent, s'élèvent et se fondent dans le ciel nocturne... Tout y est d'une délicatesse extrême, les fins arpèges de guitare et de luth, les murmures qu'on croirait émaner des arbres eux-mêmes plus que d'un humain... On entend le souffle du vent et le craquement des brindilles aussi clairement que si l'on était réellement sur cette colline plutôt rocheuse, tout seul, au milieu de la nuit, à regarder les vagues lueurs s'évanouir à l'horizon... Un gong résonne légèrement dans le lointain. Des claviers tout aussi discrets et élégants introduisent le peuple de la forêt, qui défile dans le noir sur quelques notes de flûte et le chant des oiseaux nocturnes, au rythme de percussions empruntées au Varpuspäivä de Tenhi. Et l'obscurité exacerbe l'esprit, déforme les sensations et donne à la cohorte s'éloignant des formes grotesques, s'enfonçant dans un marécage où la guimbarde remplace le coassement des grenouilles...