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Cowboy Junkies › Demons (The Nomad Series Volume 2)
- 2011 • Latent Recordings LATEXCD29 • 1 CD
- 2011 • Proper Records PRPCD076 • 1 CD
cd • 11 titres • 47:59 min
- 1Wrong Piano4:31
- 2Flirted with You All My Life3:47
- 3See You Around5:53
- 4Betty Lonely5:01
- 5Square Room4:56
- 6Ladle4:35
- 7Supernatural3:37
- 8West of Rome5:06
- 9Strange Language2:51
- 10We Hovered with Short Wings4:46
- 11When the Bottom Fell Out2:54
informations
Enregistré à la Clubhouse, Toronto, Ontario. Enregistrements additionnels par Jody Baker aux Baker Studios, Victoria, et par Dave Henry au studio Truetone, Nashville, Tennessee. Mixé par Michael Timmins, sauf Flirted with You All My Life, Square Room et Strange Language, mixés par Jody Baker.
line up
Alan Anton (basse), Joby Baker (piano, orgue, Wurlitzer, arrangements de cuivres sur Strange Language et When the Bottom Fell Out), Margo Timmins (voix), Michael Timmins (guitare, voix), Peter Timmins (batterie et percussions)
Musiciens additionnels : Jeff Bird (mandoline), Dave Henry (violoncelle), Tania Elizabeth (Fiddle), Aaron Goldstein (guitare lead sur Flirted with You All My Life), Henry Kucharzyk (arrangements de bois sur We Hovered with Short Wings), Alfons Fear/Nick La Riviere/Roy Styffe (cuivres sur Strange Language et When the Bottom Fell Out), Bob Stevenson (clarinette sur We Hovered with Short Wings), Andy Maize (voix sur When the Bottom Fell Out et Strange Language)
chronique
Ce disque n'est pas un hommage contrit, un « simple » exercice de mémoire, « à la mémoire de », obligé, officiel. J'ignore quel lien exactement unissait les membres du groupe – tout ou partie – et feu Vic Chesnutt. Amitié éprouvée, respect de pairs à pair.... Je sais, seulement, que les Canadiens avaient invité le Géorgien à jouer sur leur Trinity Revisited de 2007, réinterprétation, presque vingt ans plus tard, dans le même lieu, de la fameuse Trinity Session de 1988, qui les avait, en quelque sorte, sorti de l'ombre. Je me dis que ça ne pouvait pas, quoi qu'il en soit, arriver par hasard, pour rien. Les membres du groupe racontaient alors, en ce début des années 2010, et j'ai lu ça, aussi, qu'un projet aurait dû voir le jour – où eux auraient joué en « backing-band » tandis que Chesnutt y aurait interprété de nouvelles compositions. Mais Chesnutt est mort avant – coupant court.
Demons, uniquement constitué de reprises de Chesnutt, n'est pas le brouillon de ce disque jamais fait – une ébauche donnée à titre d'excuse, d'objet de substitution. C'est une lumière nouvelle – jeté sur l'homme et sur son œuvre. « Lumière », j'insiste – le terme est important. Car c'est ainsi qu'ils habitent ce répertoire : en l'éclairant, afin qu'on en voit tous les détails, le relief. La variété, aussi – d'émotions, d'angles sur les mêmes histoires reprises, envisagés, analysées... Contées, surtout. De Chesnutt – c'est ce qu'a fait, souvent, la presse, à l'époque, avant et après sa mort – il serait facile de ne retenir que l'amertume, le côté noir, dépressif, déprimé. Pensez, l'histoire entière du type est une aubaine, pour les amateurs de drames : paralysé à partir du bassin après un accident de voiture (conduite en état d'ivresse) à l'âge de Dix-huit ans ; alcoolisme chronique, auto-médication sauvage ; et finalement, donc, suicide à quarante-cinq piges, par overdose de somnifères, le jour de Noël 2009. Alors oui : la matière est rêche. Les récits, on s'en doute, tiraient, tiraillaient – ce que Chesnutt avait à dire n'était guère confortable, amène, riant. Le gars avait de l'humour, pourtant – du raide, de l'abrupt, souvent, d'accord, sûrement. Mais la mélancolie, par ailleurs, dans ses chansons, n'est pas toujours, indistinctement chute, déploration – elle est un lien vital avec le reste, elle voit ce qu'il reste à embrasser. Et c'est de ça – cette préhension blessée mais pas encore défaite – que s'empare le groupe.
Demons est lumineux, oui – décidément. Il rayonne d'une douceur que, pour la plupart, les interprétations originales de ces chansons n'osaient pas – n'auraient su tout à fait atteindre, peut-être, par pudeur ou pour éviter un surcroît de douleur. Les versions d'ici montrent ce qui, avant, n'affleurait, ne s'apercevait que comme indices, bouts de pistes. Tout est... Presque luxueux, là. Jamais clinquant, cependant. Somptueux, c'est peut-être le mot le plus juste, approchant. Orgues chaleureux, cuivres patinés, brillants mais jamais criards, arrangements cabaret ou country lettré, au groove jazz-blues solide mais caressé. Et la voix de Margo Timmins – particulièrement proche, ici, modulée, souple et solide, une présence - Comme toujours, encore plus qu'ailleurs, toujours amicale, toujours à l'exacte, juste distance qu'il faut pour que tout soit dit sans que rien ne soit asséné, que rien ne soit éludé. Il y a de la chair, sur ce disque, et de l'étoffe – plus sans doute que ne pouvait en porter, le plus souvent, l'homme qu'ici on chante ; mais sans que ça tourne au mensonge, à l'élégie qui embellirait pour la cacher une pauvre silhouette. Demons est plus brut, dans sa matière, presque rustique, que le Renmin Park sorti l'année d'avant – premier volume d'une Nomad Series dont ce disque est le second. Il sonne moins live, moins « prise » directe que le suivant, de la même série, Sing In My Meadow, qui viendra plus tard, la même année. C'est un disque – ce Demons – qui trouve sa place exacte, son pas, sa justesse unique. Emplit de deuil, certes – faisant son deuil, précisément. Mais célébrant – vraiment, sans l'enfouir sous le chagrin – le défunt, en se remémorant tout ce qu'il était plutôt qu'en en fixant une image monochrome. C'est comme un mouvement, une dernière promenade – qui accompagne celui-là là où l'on doit, où l'on n'a plus d'autre choix que de se quitter.
On entend un homme qui rit, vers la fin du disque, en introduction de la dernière plage. Une voix un peu nasale, un peu éraillée, qui rapporte une anecdote. Les gens rient, un public. Est-ce Chesnutt lui-même ? Je n'en suis pas sûr, rien ne le confirme, dans les crédits. Ce qui suit est une ballade – magnifique, à deux voix, qui parle de ce moment où l'équilibre manque, où l'on vient à tomber. C'est comme un rai, pourtant, qui s'élève ou qui tombe – qui perce la grisaille, l'obscurité. Ce n'est qu'un au revoir. Qui se sait définitif. Qui comprend, qui aime – qui tient une dernière fois, contre soi, celui et ce qui part.
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- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Hmmm... Possible alors, mais possible aussi qu'on "se soit raté", il y a un moment où j'ai décroché parce que le sommaire/la ligne édito général s'était mise à moins "entièrement" m'intéresser.
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- kalcha › Envoyez un message privé àkalcha
C'est possible. J'ai écrit sur les dernières années du magazine (2008-2013, de mémoire...).
- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Ah ! Vibrations, j'ai beaucoup lu à une époque ! Je dois pas mal de découvertes hors-rock (pour le dire vite et mal). Si ça se trouve j'ai lu des trucs de toi, dis-donc...
- Note donnée au disque :
- kalcha › Envoyez un message privé àkalcha
J'avais utilisé des bribes de l'itw avec Vic Chesnutt dans un article nécrologique pour le magazine Vibrations pour lequel j'ai écrit quelques années. L'itw de Chuck D, c'était pour Bokson, l'ancêtre de Mowno, mais apparemment l'itw n'a pas survécu au déménagement... Je dois avoir ça sur un vieux disque dur, mais bon... 😅
- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Chuck D., Vic Chesnutt... Tu as interviewé des gens intéressants, dis-donc ! C'est encore lisible quelque part, tout ça ?!
- Note donnée au disque :