Il n'est pas question pour moi de m'entêter à vouloir faire la peau à Fantômas. Mais les faits parlent d'eux-mêmes ; un an avant que ne sorte "The Director's Cut", le label italien Black Widow qui héberge les infâmes Runaway Totem (c'est mon opinion, je la partage) nous proposait un généreux double cd accompagné d'un copieux livret de 80 pages bourré de notes et de photos inédites. L'objet ? Ça vous dira peut-être quelque chose : un hommage appuyé aux films d'horreurs italiens - mais pas que - assuré par une trentaine de contributions tout à fait inédites autour de thèmes connus et moins connus, interprétés par d'illustres inconnus ou des artistes confirmés (Abiogenesi, Ars Nova, Sun Dial, Somnambulist, Bevis Frond, Morte Macabre...). "E Tu Vivrai Nel Terrore", titre hommage évident à la mémoire de Lucio Fulci, a donc des arguments de poids pour nous séduire, ne serait-ce déjà que par le biais de ce design de pochette signée H.R.Giger... Qui d'autre ? Mais laissons Patton où il est. En réalité, si référence il doit y avoir, cette double compilation pointe plus précisément dans la direction de Goblin, groupe transalpin aux accointances progressives marquées qui ont bâti et leur carrière et leur réputation en signant bon nombre de bandes sonores pour les films de Dario Argento. C'est donc dans un paysage où le grotesque, l'horrible et la folie se côtoient en permanence et s'interpénètrent pour ne faire qu'un que nous évoluons. Grotesque par le choix de certaines sonorités ou encore au travers de tournures parfois un peu trop abruptes. Horrible par les ambiances d'effroi déployées avec peu de moyen ou à renforts d'orgue et de mellotron. Fou enfin parce que tout cela n'est pas très raisonnable. À sa décharge, même si "E Tu Vivrai Nel Terrore" réussit le pari de proposer une compilation homogène dans son approche, l'album a du mal à décoller, souffrant d'abord d'une production parfois en dents de scie d'un titre à l'autre (trop propre pour certains, relativement crades pour d'autres), mais sans doute plus encore d'un trop plein. Deux heures trente, c'est trois fois trop long ! Pour en jouir pleinement, il me semble plus opportun d'y retourner de temps à autre et de choisir quelques titres au hasard plutôt que de s'envoyer la galette d'un seul jet. Enfin ; vous êtes majeurs et vaccinés, vous faites encore ce que vous voulez. Quoi qu'il en soit, cela reste certainement à ce jour le seul projet à être parvenu à dresser un pont convaincant entre musique gothique et progressive. Dont acte.