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Théâtre des Bouffes du Nord, Paris, France, le 3 octobre 1975.
Moines du monastère de Gyütö (voix, sceptre rituel "dordjé", clochette à main "tibu", petit tambour "damaru", grandes cymbales "bugtsal", grandes cymbales "silnyan", grands tambours "rnga", trompes courtes "kangling", trompes longues "dung-chen").
Édition remastérisée présentée sous la forme d'une "long box".
Un beau jour, alors que vous écoutez tout plein de musiques "s'inspirant de..." ou "puisant sa source dans...", vous aurez précisément envie d'y retourner, aux sources, et cela remettra sans doute en question quelques-unes de vos certitudes précédentes, ou même vous ouvrira des pans entiers de musiques nouvelles dont, jusque-là, vous ne soupçonniez pas l'existence. Appréciant les musiques minimalistes américaines, qui vont prendre racine en Orient, aussi bien que les différents usages de la voix que l'on peut faire dans la musique contemporaine, c'est tout naturellement que j'ai eu envie de me pencher vers le chant sacré des moines tibétains du monastère de Gyütö, l'un des plus réputés. La question a été naguère posée de savoir si des enregistrements du label Ocora (qui a l'habitude de capter au plus près des musiques traditionnelles du monde entier dans une optique ethno-musicologique) avaient leur place sur ce site. Avec celui-ci, au moins, la question ne se pose pas. Le chant rituel des moines tibétains est une chose à entendre au moins une fois dans sa vie : pour eux, cette voix grave et sourde, qui vibre et qui résonne de mille échos et harmonies d'outre-tombe, évoque la ferveur religieuse et imprime son caractère sacré à chaque syllabe déployée. Quant à l'auditeur occidental moyen, il sera frappé des hallucinations psycho-acoustiques engendrées par ce chant guttural, caverneux, inouï, impossible. Une sacrée peur, oui, qui le rendra tout à coup minuscule. Captés à Paris en 1975 lors du Festival d'Automne, les dix moines que l'on entend ici faisaient encore partie de la première génération à être contrainte à l'exil (en Inde) par la répression du gouvernement de la Chine Populaire. Ils se produisirent alors un peu partout dans le monde, dans le but de faire connaître leur cause. Apprêtés avec cérémonie, s'accompagnant de quelques instruments traditionnels (clochettes, trompes, tambours...), les moines de Gyütö semblent entrer en transe dès les premiers instants, et nous avec eux : la manière particulière qu'ils ont de faire vibrer les harmoniques les plus graves entrouvre la muraille matérielle, physique du son de la voix, et perce une brèche vers une dimension métaphysique. Les tantra sont des prières dont la récitation, dans la liturgie bouddhiste, doivent mener à l'illumination, à la perte de conscience et à l'effacement du moi. De l'intérêt musicologique, pour peu que l'on s'immerge totalement dans cette psalmodie, on passera ainsi rapidement à la fascination et à l'hypnose, à ce sentiment qui fait basculer la raison vers un territoire vierge de toute expérience, entre la vie et la mort. En clair : il ne s'agit ni d'ambient glauque et rituelle, ni de la célébration d'une messe noire sataniste, ni d'un requiem mortifère à la Ligeti ; mais tout de même d'une illustration chorale du "Livre des morts", d'une musique effroyable et sacrée.
note Publiée le jeudi 28 décembre 2006
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