A Piedi Nudi › Eclissi

L'ironie veut que A Piedi Nudi ait mis un terme à sa carrière au moment même où il semblait enfin avoir trouvé sa voie. Encore faut-il qu'elle soit la bonne ! Leur troisième disque, "Eclissi", par la dureté de son propos, avec un Nicola Gardinale plus imposant que jamais, pourrait faire penser à un revirement radical dans le vaste champ du métal progressif. La guitare mène désormais les débats, les rythmiques sont beaucoup plus lourdes, si bien que ce sont des interventions du claviériste Cristian Chinaglia, malheureusement toujours aussi synthétique, que dépend l'orientation des morceaux. En concèdant ainsi autant de terrain, le synthé se voit réduit à un apport minimum là où autrefois il travaillait en réel partenariat avec les autres instruments. Ceci est très nettement perceptible dès "Esodo". Et cela va se reproduire en de nombreux autres endroits du disque ("Reverendo" par exemple). Sur l'intro multidirectionnelle d'un titre comme "Temporale", il m'est même arrivé de me demander à quoi servait en réalité le clavier, le jeu du trio guitare/basse/batterie se suffisant à lui-même. Curieusement, le groupe retrouve un chanteur attitré en la personne de Marko Andreasi, mais j'ai bien du mal à m'en convaincre tant son timbre et sa façon de poser sa voix ressemble à celle du batteur Carlo Bighetti. Et pour en finir avec cette collection de membres fantômes, que faut-il dire de Enrico Barchetta, le joueur de cor, encore plus discret que sur "Creazione", c'est à dire quasiment invisible... Alors, on l'aura compris, avec comme nouvel argument la puissance de feu des guitares et la lourdeur des rythmiques, A Piedi Nudi ratisse surtout beaucoup plus large, dans l'espoir sans doute de séduire une partie du public métal prog. Malgré ses défauts, je dois bien avouer que "Creazione", lui au moins, faisait en tout cas preuve de beaucoup plus de nuances que son successeur direct.