Kabutogani › aEsTHetICs

Deux ans après le captivant "Control Design", le projet électronique Kabutogani nous revient avec une nouvelle réalisation qui aurait pour but d'extraire, de mettre en lumière si vous voulez l'éthique des choix esthétiques opérés jusqu'à présent par Jérôme Berthelot. Quand on pénètre dans cette nouvelle oeuvre, l'impression d'un inconfort finalement bien confortable s'offre à nous tant sommes nous depuis devenus familiers de toutes ces choses. "Press Record" s'écoute ainsi dans le parfait prolongement de son frère aîné, avec toujours la même saveur. Les sonorités n'invitent pas un dépaysement radical, au contraire, l'approche, elle, demeure identique, mais le décor semble avoir connu une légère altération depuis notre dernière visite entre les murs capitonnés de cette antichambre suspendue dans le vide... Comme si l'exploitation de l'espace et des résonances qui s'opèrent entre ces surfaces équidistantes étaient devenues le sujet principal de toutes les recherches de ce nouvel épisode. La matière sonore qui s'en dégage peut s'avérer parfois très compacte ("Anything Will Do") mais jamais aussi dense que ce que "Control Design" nous avait proposé tout au long de son tumultueux parcours. Sans pousser la comparaison jusqu'à la caricature, on comprend assez vite en fait que "aEsTHetICs" est à Kabutogani ce que "Dogville" est à Lars Von Trier ; une approche plus radicale d'un univers connu qui se plaît à se mettre en danger en faisant volontairement fi de certaines conventions dont on a toujours pensé pouvoir se passer. "aEsTHetICs" se veut à fortiori plus minimal et se concentre plus volontiers sur des éléments percussifs scintillants qui renforcent l'impact mélodique latent du projet expérimental. Ne vous fiez pas au blanc clinique et trompeur de sa pochette qui semble en avoir absorbé toute la noirceur, la musique de Kabutogani reste toujours aussi sombre et intrigante. Et entre ses deux disques à la forte personnalité mais aux approches différentes, un choix s'impose malgré tout : les deux sinon rien.