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John Cage (1912-1992) › Sonates et interludes pour piano préparé

  • 1999 • Naxos 8.554345 • 1 CD

19 titres - 63:36 min

  • 1/ Sonata I (3:08) - 2/ Sonata II (2:30) - 3/ Sonata III (2:25) - 4/ Sonata IV (2:03) - 5/ First interlude (3:26) - 6/ Sonata V (1:50) - 7/ Sonata VI (2:24) - 8/ Sonata VII (2:30) - 9/ Sonata VIII (2:53) - 10/ Second interlude (4:00) - 11/ Third interlude (2:15) - 12/ Sonata IX (4:26) - 13/ Sonata X (4:07) - 14/ Sonata XI (3:37) - 15/ Sonata XII (3:30) - 16/ Fourth interlude (2:45) - 17/ Sonata XIII (3:55) - 18/ Sonatas XIV and XV "Gemini" (after Richard Lippold) (6:18) - 19/ Sonata XVI (4:47)

informations

Eglise Saint-Jean-Chrysostome, Newmarket, Canada, du 11 au 13 juillet 1998.

Les interprétations de cette oeuvre sont très nombreuses sur disque. J'ai choisi de présenter cette excellente version de Boris Berman, récente et à petit prix. Celle de Steffen Schleiermacher, dans le cadre de son intégrale de l'oeuvre de Cage pour piano, est recommandable aussi. Parmi les versions "historiques", il me semble que celle de Gérard Frémy, récemment rééditée, s'impose.

line up

Boris Berman (piano).

chronique

D'après la légende, John Cage aurait "inventé", en 1938, le piano préparé à cause d'une bête contrainte d'espace : il devait composer une musique pour un spectacle de danse, et il n'y avait pas, dans la salle, assez de place pour tous les instruments à percussion qu'il aurait voulu utiliser. Il se servit donc d'un piano pour recréer des sonorités variées en plaçant entre les cordes de l'instrument divers objets (morceaux de tissu, de plastique, écrous, gommes...), faisant résonner l'instrument à la manière d'un gamelan balinais, ou bien étouffant sensiblement le son, ou bien encore créant des harmonies incongrues, acides... Le ventre du piano devenait ainsi plus fécond qu'un ensemble de percus exotiques. Tellement "exotique", d'ailleurs, que l'on a plutôt la sensation en l'écoutant qu'il s'agit tout simplement d'un instrument nouveau, unique. Un nouveau-né monstrueux. La démarche est fondamentale (et fondamentalement "moderne" aussi), car elle autorise, tout à coup, le compositeur "sérieux" à détourner les objets de leur fonction primitive pour en tirer un parti différent, idée beaucoup exploitée par la suite (depuis Penderecki qui demande à ses violons de taper sur le bois de leur instrument avec leur archet, jusqu'à Fred Frith qui martyrise les cordes de sa guitare électrique avec des lanières saupoudrées de limaille de fer). En outre, l'invention de John Cage va connaître un franc succès parmi ses collègues. On entend un piano "préparé", certes de manière très différente et avec des visées opposées, dans des oeuvres aussi diverses que la "Symphonie pour un homme seul" de Pierre Schaeffer et Pierre Henry, "Tabula rasa" d'Arvo Pärt, quelques Etudes de Ligeti (les "touches bloquées")... Bref, des choses qui comptent dans la musique de notre temps. Venons-en plus précisément à ces "Sonates et interludes" (1946-48) de Cage. Ca n'est pas sa première oeuvre pour ce nouvel instrument (qu'il utilisera beaucoup), mais c'est de loin sa plus marquante. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, il n'y a pas ici intégrée la notion de musique "aléatoire", autre élément primordial qui fera l'originalité de l'Américain. Non, c'est d'une manière tout à fait précise que doivent être insérés les petits objets dans les cordes du piano avant l'exécution. Et tout est écrit à l'avance, rien n'est laissé à la "libre interprétation" du pianiste. Voilà pour situer l'oeuvre. Maintenant, en oubliant tout ça pour se concentrer sur la seule musique, eh bien, aujourd'hui encore, cette suite n'a rien perdu de son pouvoir de fascination. D'abord à cause de ces sonorités si étranges et envoûtantes, qui ne laissent pas de surprendre. Ensuite parce que les compositions de Cage sont réellement belles, fouillées ; que ce soit par le biais d'une pulsation régulière ou au contraire d'un éther ménageant de longues plages de silence, elles distillent tantôt une certaine nostalgie, avec cette espèce de piano-jouet d'un nouveau genre, tantôt une atmosphère de calme purement méditatif. Quoique l'aspect percussif du piano soit bien évidemment remis au premier plan, l'oreille n'est jamais violentée, agressée. Tout est zen au contraire, détaché. A travers cette forêt de djembés extra-terrestres, de gamelans désaccordés, de célestas d'outre-tombe, et de piano (pourquoi pas), c'est bien vers une certaine philosophie orientale que Cage est déjà tourné par sa musique. Une oeuvre essentielle.

note       Publiée le mardi 24 mai 2005

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    Moonloop Envoyez un message privé àMoonloop

    Énième rencontre, mais réussie, de l'Orient avec l'Occident, de Suzuki avec Cage peut-être (https://youtu.be/pGMnsB80fe4) ... Étonnante musique, étrangement méditative... Aussi joueuse, libérée et provocante qu'un enfant... Il y a un excellent enregistrement avec Cédric Pescia également. (Manque plus qu'une chro pleine d'audace sur 4,33...)

    mangetout Envoyez un message privé àmangetout

    Je ne sais pas trop où poster ceci, mais il serait quand même intéressant de continuer la recension des œuvres de cet olibrius de Cage, je sais la tâche ardue mais le résultat ragaillardirait le site, je dis ça je n'ai rien dit hein. Il est à noter que la discographie le concernant s'est particulièrement enrichie ces dernières années avec comme piste de travail ses fameux "Song books" ou le superbe coffret de sa musique pour piano sorti il y a quelques années dont je narrais l'acquisition dans le commentaire précédent celui-là... il y a plus d'un an.

    mangetout Envoyez un message privé àmangetout

    J'ai, pour ma part, déjà cette très belle version par Boris Berman et viens d'acquérir un énorme coffret (18 CD) de l'intégrale de sa musique pour piano qui contient, entre autres, ces fameuses "Sonates et interludes", l’interprète se nomme Steffen Schleiermacher qui est parait-il un connaisseur de la musique contemporaine ayant déjà joué des pièces de Satie, Glass, Feldman, Schoenberg ainsi que des compositeurs japonais.

    freaks Envoyez un message privé àfreaks

    je viens d'écouter la version de james tenney aussi (compositeur et ami de cage - spécialiste de nancarrow aussi selon wikipedia): recommandée!

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    Oburoni Envoyez un message privé àOburoni

    Quand le piano devient un monstre, deforme, maltraite, torture... Car comment peut-on avoir l'idee de traiter un instrument comme ca ?! Et malgre tout le resultat final est beau ! Ici John Cage a voulu exprimer les huit emotions de la tradition indienne : amour, erotisme, heroisme, etonnement, peur, chagrin, colere, degout. Alors, franchement, il y a tout et rien de tout cela !! On se se dit surtout "Putain c'est un...piano !?" Pour les interesses "The Perilous Night" vaut aussi le detour. Une partition plus intense, un jeu tres tendu ( j'ai une version jouee par Margaret Leng Tan ), une impression constante d'etre sur la breche... Du grand Cage !

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