Oi Va Voi › Laughter through tears

Que nous l'ayons vécu indirectement ou de manière intéressée parce que nous guettions la moindre de ses évolutions avec fébrilité, la scène électronique qui imposa sa loi dès 1988 connût dans la décennie qui suivit un éparpillement et un esprit d'ouverture qu'aucun autre courant musical de l'époque ne peut raisonnablement revendiquer. A tel point qu'aujourd'hui, on retrouve des traces de cette influence dans des groupes qui jusque là s'étaient montrés totalement étrangers à cette démarche. A tel point que la frontière des genres se dissipa. Qu'est-ce qui est encore électro ? Qu'est-ce qui ne l'est pas ? Rangé dans cette catégorie, les jeunes Oi Va Voi ont de quoi remettre en question notre conception de la chose. Car excepté une rythmique effectivement par moments héritée de la house, du trip hop ou de la drum'n'bass, leur musique reste avant tout acoustique. Instruments à vents (trompette, saxophone, clarinette), instruments à cordes (violon, violoncelle) résident au coeur même de leurs dix chansons, leur conférant ce cachet authentique. Formation londonienne aux origines diverses, Oi Va Voi va puiser dans ce métissage la force qui donne à leur cocktail musical sa saveur inédite. Worldbeat par conviction, comme les français d'Ekova, Oi Va Voi chante dans toutes les langues, anglais, espagnol, hébreux, scandinave, mais va plus loin encore en proposant des mariages inédits qui donnent à l'album une gravité bienvenue pour contrebalancer certains essais au format radio plus dispensables ("D'Ror Yirka", "Gypsy"); "A Csitári Hegyek Alatt" est une de ces petites merveilles, entre Zero 7, Mùm et Paatos. Mais ici pas de tendance suicidaire, ni prog (pléonasme ?). "Ladino Song", "7 Brothers" puis "Hora" ou encore "Pagamenska" créent avec brio ce pont entre arrangements électroniques modernes et orchestrations poussiéreuses issues des films d'Emir Kusturika. Les inconditionnels de l'esthétique trip hop seront aux anges de retrouver à travers le chant de KT Tunstall, une des nombreuses invités, les souvenirs d'une autrefois brillante Martina Topley-Bird (Tricky). Recommandé.