Blodulv › Diatribe

Avant toute chose, baissez le volume habituel de votre sono avant d'en exploser irrémédiablement les baffles : "Diatribe", le troisième et court méfait de Blodulv est en effet le disque gravé au plus fort volume que j'ai pu entendre jusqu'ici... et de loin. "Grim disturbance" démarre à plein régime et la claque est cinglante. Les guitares ont désormais rejoint l'extremisme sonore de Morn dans une débauche de saturation à l'aggressivité difficilement supportable, reléguant la boîte à rythme, toujours primaire, au niveau du petit bruit sec à peine audible sur les passages les plus chargés de son... et SataN sait s'il y en a. Avec des titres qui s'étirent tous jusqu'aux sept minutes et plus, avec toujours un riff ou deux, seulement, comme base instrumentale, Blodulv continue son travail lobotomique et brutal, tout en l'augmentant d'une dimension chaotique largement désagréable, fruit de l'intense fusion des guitares et de Morn dans un jusqu'au-boutisme sonore rarement atteint avant eux. L'effet est malheureusement à double tranchant, Morn ne trônant plus au dessus du reste, et les riffs, pourtant plus tendus et dépressifs que jamais, perdant de leur impact dans cette uniformisation magmatique. "Diatribe" est donc une incontestable épreuve sonore, une incarnation franche de la haine destructrice, qui pousse hélas le vice jusqu'à la destruction de son propre travail. Morn porte de mieux en mieux son nom, de plus en plus fatigué, déprimé, de moins en moins violent il s'enfonce sans retenu dans le dégoût pur et simple, faisant impasse sur le rythme au profit de plaintes lentes et doomesques, constamment écrasées par les aigus atroces des guitares scie-sauteuses. Le minimalisme volontaire de la programmation ne fait plus que sourire, particulièrement lors des accélérations où le son insignifiant de la machine se trouve si englouti que l'impact de ses coups est réduit à zéro. Grendel a composé ses riffs les plus brillants, primaires comme il se doit mais porteurs comme jamais de tensions et de désespoir, "Diatribe" avait de quoi conforter les tyrans dans une démarche limpide, et de quoi les hisser au rang de groupe modèle. Mais à trop forcer les évidences, à ne jamais sortir des principes surbasiques dans sa quête des effets (ici, augmenter sans finesse la violence du son pour augmenter la noirceur du tout), Blodulv commence à révéler une certaine naïveté qui s'accorde bien mal avec son voeux de haine. Rien de bien inquiétant, Grendel composant mieux, et "Diatribe" n'étant certes qu'un E.P. transitoire, dans lequel on retrouve les qualités premières du mystérieux combo... même si elles sont hélas ici bien malmenées, par une chute imbécile dans un son mal géré.