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Roxy Music › Stranded

cd • 8 titres • 41:12 min

  • 1Street Life
  • 2Just Like You
  • 3Amazona
  • 4Psalm
  • 5Serenade
  • 6A Song for Europe
  • 7Mother of Pearl
  • 8Sunset

informations

Air Studios, Londres, septembre 1973

line up

Bryan Ferry (voix, piano), John Gustafson (basse), Eddie Jobson (violon, claviers, synthétiseurs), Andy Mackay (hautbois, saxophone), Phil Manzanera (guitare), Paul Thompson (percussions)

Musiciens additionnels : Chris Lawrence (contrebasse sur 8), The London Welsh Male Choir (choeur sur "Psalm")

chronique

  • glam rock

Que s'est-il passé ? Où est-il donc allé, le groupe qui nous avait enchantés à coup de "Ladytron", de "Sea breezes" et de "Bogus man" ? Sans doute une partie de son âme s'est-elle envolée en compagnie de Brian Eno, qui, décidément, avait trop à dire de son côté pour supporter le temps d'un album supplémentaire les diktats d'un Bryan Ferry, qui voulait continuer à faire de ce groupe "sa" chose, "son" rêve délirant de kaléïdoscoper et d'emboîter dans une seule et même formation tous les genres musicaux qui avaient fait le bonheur de sa jeunesse, en y insufflant une délicieuse et pourrissante perversité. Voilà, Eno est donc définitivement parti vers des contrées plus expérimentales, en compagnie de Robert Fripp et de quelques autres ; et du coup, il semble que le reste de la formation ait pris le chemin inverse : un virage pop certes d'un raffinement et d'un goût exemplaires, mais dénué de cette saine folie qui présidait jusqu'alors aux destinées du groupe. Bien sûr, la machine est bien rôdée et les compositions touchent ici à la perfection ; ce disque reste pour beaucoup d'admirateurs du groupe une très grande référence : on le comprend aisément en écoutant le déchaînement de "Street life", qui ouvre le disque, les ensorcellements pianistiques de "Psalm", les ballades sublimes que sont "A song for Europe" ou "Mother of pearl", qui débute pourtant sur un mode assez agressif, ou encore la sombre et majestueuse clôture de "Sunset". Mais les expérimentations de naguère sont pour la plupart passées à la trappe, d’où un sérieux problème : Roxy Music est devenu un groupe presque comme les autres ; et ça, c'est impardonnable.

Mauvais
      
Publiée le samedi 12 mars 2005

chronique

  • glam rock > roxy music

"Roxy Music est devenu un groupe presque comme les autres ; et ça, c'est impardonnable"... Tout est dans le "presque", justement. Après un chef-d'œuvre et un coup de maître, Roxy Music devient ici donc, PRESQUE un groupe comme les autres... mais Roxy Music n'a jamais été un groupe comme les autres. Et il ne le sera jamais vraiment, jusqu'aux cimes veloutées du moelleux Avalon. Bien des groupes ont suivi, ou juste singé Roxy Music ; certains ont développé leur truc propre, mais aucun n'a atteint leur classe surnaturelle - même si je garde un gros faible pour les Cars, même si de nombreux (post-)punks et gothiques dans leur sillage seront tout aussi singuliers, bien sûr : Roxy Music dansaient dans leur dimension, leur fusion, leur glam sophistiqué et ultra-fluide n'avait aucun rival. Il bouffait un peu à tous les râteliers tout en étant ultra-cohérent, et n'a jamais été difficile d'accès, même dans le premier (leur inégalable chef d'œuvre). Il était plein de bizarrerie en étant extrêmement fluide. Racoleur et exigeant, putassier et élitiste à la fois : un peu ce qu'exprime le visage de leur première pin-up.

Dès l'intro aux premières notes insolites, suivie d'un rock hargneux aux relents proto Stranglers (quand Bryan fait vocalement dans le rugueux ça me fait toujours drôle), Stranded est assurément une des parades les plus vicieuses du groupe. Elle vous fabrique du fantasme fantasque-fantôme, du piano rock bien charnu, qui peut sembler trivial à bien des endroits mais vient bien d'une autre dimension, tel ce final magique le bien nommé "Crépuscule" - ou plutôt éclipse de Soleil à la fine fleur de sel. Arty Roxy ici, toxique encore, commence déjà à apprendre la mélancolie tendre. Je range cet album dans la catégorie bâtarde et élitiste des albums de transition essentiels. Un album de caméléons vénéneux bien sapés. Le costume est impeccable, mais constellé de fines gouttelettes de sang. Luxueux mais sale à sa façon (ce solo sur "Amazona", mama mia !), Stranded est bien ce fluide glam rock classieux-vicieux, cette pop de dandy dangereux, au coutelas aiguisé et aux trémolos de princesse mâle, mi-diva mi-déviant. Cette odeur de Roxy Music première mouture de contrebande, de seconde main, comme vous voulez, contribue vraiment au charme de Stranded. Au moins autant que sa pochette moite et suintante, la plus érotique du groupe assurément, tout en étant la plus sinistre. Éros et Thanatos encore : l'orgasme ou la mort ? Les deux, Herr Schrödinger. Les autres top models du catalogue Ferry sont loin de cette nuit de canicule tragique. De ce rouge sang, de ce corps ruisselant... Que s'est-il passé à l'issue de Stranded ? Mystification, ou ensorcellement ? Il n'est pas le meilleur du groupe, d'accord, mais il est un peu à mes yeureilles la fusion de ses deux plus généreux albums : la décadence du premier, les pics d'émotion du second. Fondus dans une teinte différente, celle d'un disque de glam rock un peu plus standardisé, ce qu'on peut mettre sur le compte du départ de Brian Eno si on veut... ou d'un désir d'homogénéiser les mondes mélangés, de peaufiner la sauce, d'arrondir les angles de l'expé, pour mieux empoisonner en beauté. Est-ce donc cela un naufrage, nom d'une pie volage ? No Eno ? And so what ? Jobson ne salope rien, même les touches un peu folklo s'ancrent crèment. Roxy Music n'a simplement plus besoin des expérimentations de Brian à ce stade, ayant comme retenu son parfum ou sa saveur, par une forme de persistance rétinienne discographique (?)

Et à ce sujet, la simplissime et émouvante "Psalm" est au rang de ce que John Cale fera avec Eno sur Fear... Un lyrisme et un crescendo étiré à mort qui tapent juste, un spleen recroquevillé qui se déploie sur des claviers pâles et un tempo divin. Et puis il y a la diction ultra-altière de Ferry sur le rock tellement bien balancé de "Mother of Pearl", évoluant en ballade à la proglam jusqu'à cet a capella choral qui arrête les aiguilles de la Rolex à gousset. "Divine intervention, always my intention, so I take my time" : c'est du génie pur qu'on vous tend à la petite cuiller, ça, mes salauds... La toxicité extrême de l'angliche, du rosbif, de la Perfide Albion... Mieux : "A Song for Europe", avec ses vagues airs de variation sur "While my guitar gently weeps". Une des grandes chansons tristes de Bryan Ferry, avec la petite touche romantoc et fétichiste du chant en français à couper au couteau à beurre d'argenterie gastronomique. Flamboiement et mélancolie, le kitsch et le classieux n'existent plus : ils sont la même chose. Sentiments châtiés par le putassier ou l'inverse, transe et contrôle maniaque du détail made in Ferry. Une beauté échouée, en transe, dans un coin du jardin pendant que les convives devisent lectures et taffetas. Le venin dans le carré VIP - un hexaèdre en vérité. Une fleur carnivore flanquée dans la poche à mouchoir.

Très bon
      
Publiée le mardi 25 février 2025

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Note moyenne        13 votes

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Coltranophile Envoyez un message privé àColtranophile

Même si y'a comme un trou d'air, et ça n'ira pas en s'arrangeant pour un temps, il reste quelques moments de folie (Amazona et Mother of Pearl) et d'autres d'un pathos languissant juste ce qu'il faut (Sunset, A Song For Europe, Psalm) pour sauver la mise. Le reste suinte la paresse, celle qui prendra de plus en plus de place chez eux jusqu'à "Flesh.....".

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Glapowski Envoyez un message privé àGlapowski

Décidément, l'écoute de ce disque m'ennuie un peu... Vraiment très loin des deux premiers, qui me passionnent toujours autant depuis, euh, nom d'un chien ! 50 ans que je les écoute.

Aladdin_Sane Envoyez un message privé àAladdin_Sane

Allez, une boule en plus. Il est très bon en fait cet album. de toute façon, jusqu'à "Country life", ce groupe est formidable (après, faut attendre "Flesh+blood" pour que mon intérêt revienne)

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Aladdin_Sane Envoyez un message privé àAladdin_Sane

Même si finalement je lui préfère "Country Life", celui-là il mérite de figurer avec les 2 premiers dans toute discographie rock/pop qui se respecte.

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Aladdin_Sane Envoyez un message privé àAladdin_Sane

Song for Europe quand même...

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