Lisa Germano › Lullaby for liquid pig

Cinq longues années se sont écoulées depuis que mon italo-américaine préférée avait refermé le livre de ses angoisses sur un "Slide" qui semblait libérateur. Ce temps fût-il nécessaire afin de s'apercevoir avec amertume par elle-même que les moments de bonheurs et de joies ne sont que des pics incongrus et ponctuels dans un graphique dont la linéarité prédomine avec perfidie ? "Lullaby for Liquid Pig" se débarasse de la production anesthésiante de Tchad Blake et nous livre une Lisa telle qu'en elle-même, telle qu'elle l'a toujours été ; tourmentée, habitée et guidée par le doute, bien décidée à ne plus combattre sa personnalité profonde, mais plutôt à l'assumer tout en s'y épanouissant. Ses histoires sulfureuses d'innocence perdue, ses ritournelles enfantines perverties par le monde qui l'entoure, un monde où tout foire, font leur grand retour. Mélancolique au point de vous arracher des larmes de compassion ("Paper Doll", "All the Pretty Lies", "From a Shell"), on sent malgré tout que Lisa a pris du coffre, et aussi un peu plus de recul par rapport à toutes ces choses qui nous empoisonnent régulièrement la vie. Son refuge, et celui qu'elle nous invite à partager, c'est celui qui est en dedans de chacun d'entre nous, comme l'évoque du bout des lèvres la chanson "Pearls". Trop content de la retrouver, je lui attribue une note très généreuse. Je pourrais bien me raviser plus tard, mais pour l'heure, je me délecte d'avoir retrouvé la chaleur de sa voix et de son corps dans lequel je m'abandonne volontiers. En pleine confiance. Je m'oublie. Je l'écoute. Et je l'aime.