Saez › Jours étranges

Première impression quand on écoute pour la première fois cet album : "waowww ! ça scotche ; ça mérite une deuxième écoute !"… Bref, on peut difficilement rester indifférent devant la voix de Damien Saez. Alors, on s’approche des baffles, on monte un peu le son et on tend l’oreille. Après une deuxième écoute, on se dit que le prochain album a de grandes chances d’être un quasi-chef d’œuvre. Pas de doute : ce premier enregistrement est TRES prometteur. On peut dire que le jeune Saez n’a pas peur de marier les genres : il passe d’un rythme pop-rock endiablé (comme dans "Jeune et con") à un son de guitare acoustique ("Jours étranges") ou à une rythmique quasi dance ("Roll’n roll star") ou encore à une ballade blues-jazzy, style crooner américain ("My funny Valentine", seul titre chanté en anglais d’ailleurs). Certains diront que musicalement parlant, il y a encore quelques ajustements à faire et un style à mûrir, n’empêche que cet album est digne du plus grand intérêt, car il nous annonce de très bonnes choses pour la suite. Ce qu’on retiendra, c’est cette voix, à la fois provocante et fragile, enivrée tout autant qu’enivrante…Le talent de l’interprète est étonnant et en rappelle quelques autres comme Catherine Ringer des Rita Mitsouko ou encore Stephan Eicher par moments. On joue sur les décalages, les décrochages et l’impureté. On y ressent ce même zeste de folie et d’exubérance (… voire même de provocation), de sensibilité à fleur de ton. Mais avec Saez, on y gagne en désespérance (on est loin du petit train qui s’en va dans la campagne !). Cet album exprime une errance, un non-contrôle, un dernier sursaut d’indignation avant le noir et le silence. Une voix qui vit le passage, qui s’exprime une première (dernière ?!) fois de n’avoir pas su/pu parler et se meurt à l’intérieur de chaque mot prononcé. C’est une révolte toute entière, ce sont les textes et ce son de voix qui nous le disent. "Jours étranges" rappelle parfois Noir Désir avec l’excellent "Tostaky" (une inspiration peut-être !?) Musicalement, cet album peut être qualifié de "pop-rock efficace", sans originalité extrême. C’est de la musique "bien propre" ; toute la "cradeté", l’inquiétude, et l’intérêt que cela suscite passe par le talent de voix de Damien Saez et les textes qu’il a écrits. L’album se termine sur un au-revoir très doux et assez troublant, avec des voix en écho qui apaisent un peu le chaos. Bref, un beau début d’histoire musicale pour Damien et son groupe. Le talent est indéniable... J‘espère pouvoir chroniquer bientôt un deuxième album (la sortie est prévue en octobre 2001) et le gratifier d’un six en notation ; en tout cas, c’est bien parti pour !