Christine 23 Onna › Shiny Crystal Planet

Cette fois-ci, Monsieur Maso (Takushi Yamazaki alias MASONNA) et Madame Angel'In (Fusao Toda, guitariste flamboyante d'Angel'in Heavy Syrup) posent en hippies pas frais... Euh, pardon : mystérieux et pénétrés, profonds, « deep, tavu ». Le décorum sixties/seventies – typo sur la pochette, couleurs, cliché rock-star à l'ancienne, donc – est pleinement assumé. Et le son... Eh bien le son suit.

Si le premier album du duo suintait d'une noise teintée d'un rock un peu flou, granuleux, tout en restant dans la jam plus ou moins informe, une sorte de glissement, sur celui-là, s'opère – plus loin vers une espèce de... Structuration. Avec des... Mélodies ?! Tout reste assez sommaire, bien sûr – lignes de basse (synthétiques) qui pulsent sur trois notes, patterns de boîte à rythme simplistes mais qui avec le reste bétonnent une espèce de... Eh bien oui, qui l'eut cru : de GROOVE. L'impression demeure de se trouver aspirés dans un univers parallèle, déformé (défoncé ?) – où les B.O. de films de S.F. fifties genre Planète Interdite se seraient pris un gros coup de surtension qui les auraient fait muter façon Tetsuo. Des trouées, séquences de bruit sans propos viennent encore casser l'écoulement de la chose, frapper façon jump-scare. Mais des riffs se détachent cette fois pour de bon – et même, émanant de la guitare de Fusao Toda, des espèces de solos (!), des élaborations, autre chose que des ressassements de textures jusqu'à explosion.

La chose bascule, oui – du côté d'une musique qui s'accepte musique, autre chose qu'une colorisation de boucan pour faire illusion (ou piège). L'amour de la série B – ou Z – s'écrit en toutes lettres, le goût pour les vieilleries qui se dansent et émanent un parfum louche (Mondo Nude Mode, Groovy Spacy...). On peut même avoir par endroits l'impression que ces deux là déconnent un peu, s'autorisent à blaguer, un recul sur ces références bis. C'est peut-être, tout simplement, qu'il et elle s'amusent cette fois pour de bon ?

Bizarrement, pourtant, je trouve ce Shiny Crystal Planets plus fatigant que son prédécesseur – alors que techniquement il est bien plus audible, sans trop de doute travaillé, abouti davantage. J'ai par passages la sensation d'un disque un peu laborieux – qui souligne un peu trop l'effort, les références, la volonté de ne pas s'en tenir au gros bordel noise à peine un peu plus rythmé. J'ai régulièrement, à l'écoute, le sentiment que les moyens leur manquent – ou bien au contraire qu'il y en a trop, ici, de déployés, que leur désir de modeler quelque chose de simple et carré, sans cesser d'être sale, cale quelquefois, se bute aux habitudes de l'une et de l'autre, qui ne parviennent pas à complètement se rencontrer – l'obsession des paquets de fréquences informes pour Maso, la science des longues impros en montées/stases/dépressions/chutes/flambées psychédéliques, pour Fusao Toda.

« Manque un truc/Parce qu'il y en a trop » ? Quelque chose de cet ordre, oui. La paire poussera plus loin, sur le suivant – en direction du garage, sans ambages. Une étape de plus. Ils y diraient une description – titre-manifeste et nom de l'incarnation d'après, ou d'autres les rejoindraient, qu'il et elle n'auraient plus besoin de projeter, modéliser, remplacer par des machines, leur substituant, plutôt, d'autres robots de chair pour choper l'Électrique.