Merciful Nuns › Demons / Elysene

Les clips récents de Merciful Nuns m’enchantent, il y a en eux quelque chose du Zeigeist d’une époque à l’agonie qui cherche à se réinventer pour ne pas mourir; ce noir et blanc, ces statues funèbres, ce symbolisme du temps qui passe… Pourtant, il n’y a aucune pose là derrière, on sent les réflexions profondes, la continuité d’un travail entamé depuis plusieurs décennies avec Garden of Delight dont l’esprit se retrouve quelque peu dans ces quatre compositions. Alors que le EP précédent jouait la carte de la fragilité, du deuil, celui-ci s’affirme nettement plus guerrier sans perdre en filigrane une légère note de spleen. Pas de rythmes lents, le ton est assurément prêchant, colérique même sur ‘E.N.D.’ (‘Fuck them, fuck them all !’) car après tout, Artaud n’a nullement rejeté ses oripeaux de prêcheur. Les Allemands demeurent fidèles à cette technique que je chéris d’une rythmique franche, imperturbable, mixée en avant, sur laquelle les guitares vont tisser un mur obscur, comme une oriflamme noire servant de toile de fond à la voix. Au risque de me répéter, le combo a su tisser disque après disque une forme de goth rock axé sur une cosmologie cohérente, se riant des structures couplet/refrain. Car les paroles comptent, c’est évident, mais contrairement à Lacrimosa par exemple, Artaud sait intégrer ses textes de manière fluide sans flinguer les mélodies car il ne cherche pas à écrire des libretto classiques. Beaucoup d’acronymes, une idée de plus en plus chère au sein des Merciful Nuns comme dans certains side-projects (N.E.O.) mais surtout une musique sombre, à la production d’ébène ample et profonde qui fait du bien pour capter un certain regard du monde de manière combattive.