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Wire › Silver/Lead

cd • 10 titres • 36:10 min

  • 1Playing Harp for the Fishes
  • 2Short Elevated Period
  • 3Diamonds in Cups
  • 4Forever & a Day
  • 5An Alibi
  • 6Sonic Lens
  • 7This Time
  • 8Brio
  • 9Sleep on the Wing
  • 10Silver/Lead

informations

line up

Colin Newman (chant, guitares, claviers, mandoline, synthétiseur, effets, production), Graham Lewis (basse, chant, chœurs, synthétiseurs, boucles et samples), Matthew Simms (guitares, lapsteel, mandoline, synthétiseurs, effets, autoharpe), Robert "Gotobed" Grey (batterie)

chronique

  • adult oriented wire

Alors celui-là, je l'avais vraiment pas vu venir. Silver/Lead est peut-être ce que Wire ont jamais fait de plus proche d'un album pop-rock académique. Écoutable comme du Dire Straits - Wire Straits ? Et c'est étonnamment frais. Et subtilement très différent de ce qu'aucun autre groupe ferait - on les reconnaît y a pas de doute... mais ici ils se permettent franchement la gentillesse, la douceur, et tout simplement : l'émotion. J'en veux pour preuve les magiques "Diamonds in Cups" et "Forever and a Day". Très fort de faire ça, comme ça, arrivé à quarante ans de carrière, pour un groupe réputé opaque et insaisissable. En vrai ce Wire-là passerait sans problème sur Chérie FM. Et ça n'empêche en rien la patte expérimentale d'opérer en sous-couche, par strates de sons, d'échos, d'étrangeté flottante, comme un halo diffus. Les guitares chez Wire ont toujours cette texture magique. Les chansons qui ont apparence d'ébauche, sont possiblement des trous noirs. D'où jailli cette lumière si froide et si chaude. Wire, doux Wire... Un album de plus qui me fait recommander l'écoute répétée de tous ces Wire tardifs, à côté desquels tant son passés, croyant à un groupe de vieux punks rincés. Sont pas rincés du tout, ils ont juste l'âge de leurs artères, et ça ne les empêche pas de continuer à avancer dans ce monde à eux. Cette dimension rien qu'à eux.

Leur album le plus bienveillant, le plus accessible. Leur album le plus calibré, et à la durée parfaite. Ils refont aussi un peu le même album, que cet impeccable sans titre ou son appendice Nocturnal Koreans ("An Alibi")... mais sans les parties extrêmes. Juste la douceur onirique, et l'envoûtement tranquille. La tension soft, en quelque sorte. Plus rock-pop vraiment, jusqu'à faire dans la power pop générique ("Short Elevated Period")... ou presque ! Ici on est en quelque sorte sur du Wire-AOR. Ou du Wire-REM - et pas celui jangle ! J'en veux pour preuve ces passages même romantiques très choupinous. Un Wire gentil oui. C'est pas banal. Eux qui faisaient du clin d'œil taquin à Pink Floyd à leurs débuts punks, finissent ironiquement par sonner aussi dad-rock sur "Sleep on the Wing"... Wire gentil roudoudou ? C'est étrange, en soi. Ensuite on réalise que les cordes et leurs échos nous bernent puis nous cernent, et viennent quelques nuages gris au loin... Presque des mirages ces chansons, à ce niveau... Mais des mirages qui deviennent de solides chansons, que je me suis mis à avoir dans la tête, dangereusement, comme si c'était du U2. Assez terrifiant, mais tranquillement. Alors qu'à la base je croyais à des démos de tubes. Il n'y a rien de démo non, sinon de démon, sous l'angélique allure - détachée comme de coutume - il n'y a rien de pas fini, rien d'inachevé ici : il n'y a que des ébauches parfaites. Une "Diamonds in Cups" dont le petit riff FM et la mélodie si touchante reviennent hanter tranquillement. Des chansons lancées au présent, au singulier. Singulières. Qui me disent que oui : Wire peut faire dans l'émotion. Et que ça sonne à la fois maladroit, et intriguant. Puis pas du tout maladroit, et touchant. Deviendraient-ils fleur bleue avec l'âge ? Ici on sent une volonté de percer la coquille, la carapace. Le bunker. Wire exprime et imprime en douceur sa tristesse tranquille, son pathos est comme une buée... Dad-rock Wire, sans sénilité, tout dans la candeur, la simplicité, l'évidence ? Le groupe semble aussi parfois piquer du nez avec grâce sur son son, comme s'il relâchait l'attention tout en... maintenant la tension ("Sonic Lens"). Il y est toujours beau. Dans la nudité mélodique. Une pureté, exprimée par ce superbe final éponyme aux cordes délicieusement lynchiennes.

Il y a pas mal de choses ici, sous ces airs de rien ou pas grand chose, au rythme du poum-tchak usé-usiné. La découverte un peu ébahie d'un groupe qui aura mis quarante ans à faire un album de rock/pop simple... Un album très sobre, très direct, oui, celui d'un groupe qui n'a plus rien à prouver, ne veut plus rien prouver, et trace la route tranquille dans des morceaux si adultes et pourtant si enfantins. Leur album américain, en quelque sorte. Et peut-être, du moins en ce qui me concerne : le plus bel album de toute leur carrière. Sans autre écho que le sien. Ou le mien, quand je me surprends à chanter en chœur "oooh Darling... I want you to stay". Un soir, un matin. Ou dans ma tête. Et puis y entend trotter l'écho à celle-ci : la très belle et soyeuse "This Time", et ses étranges relents Type O Negative joué par des fonctionnaires sexagénaires en chemise bleu ciel. Je suis sûr qu'ils l'ont fait exprès. Elle semble tellement axée sur / variation de "Forever & a Day", dont on attend le refrain en vain, et c'est normal : Wire ont toujours été friands des chansons-sœurs, parfois même au sein d'un même album. Ici cela renforce la cohésion, déjà très forte, de ce petit album au pouvoir de séduction insoupçonné. Le plus beau du groupe, sans doute. Quand s'en viennent les relents blues & post rock façon Wire d'une bien nommée "Brio", seule chanson obscure de l'album, écho à "Forward Position", pure et magnifique... je suis touché au cœur, oui. Au cœur du Wire.

Très bon
      
Publiée le vendredi 16 mai 2025

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    Raven Envoyez un message privé àRaven
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    Pas assez matheux et trop littéraire, mais ça n'est pas un gros frein pour aimer Wire puisqu'ils ont une dimension poétique secrète mais réelle, et profonde... (un scientifique me dirait que les maths aussi ;).

    Oui dur de les départager au final, alors que j'étais parti sur l'idée que ce choix de ne pas choisir de titre justement, était raccord avec la pochette et la place qu'il fallait lui accorder à cet "éponyme" : centrale dans leur discographie, album-pivot dans la dernière partie de carrière du moins... Celui-ci est solide et plus touchant, le gris s'est mué en couleurs pastel du rose au bleu ciel - même une chanson power pop turquoise délavé de chez délavée comme "Short Elevated Period" s'est fait sa place tranquille.

    Note donnée au disque :       
    Giboulou Envoyez un message privé àGiboulou

    Comme Wire aime les mathématiques (déduction personnelle), je dirais que pour comprendre l’intégrale de Wire, il faut prendre en compte les albums « fonctions primitives » (Change becomes us, 10:20, Documents & Eyeswitness, etc.) mais aussi les « fonctions dérivées ». Comme celui ci. La constante étant la qualité. Sinon, Diamonds In Cups : LE piège auditif. Ce Silver/Lead joue des coudes avec l’éponyme pour la pole position. Fonction Repeat enclenchée.

    Message édité le 17-05-2025 à 07:57 par Giboulou

    Note donnée au disque :