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Blur › Blur
- 1997 • Parlophone FOODCD19 • 1 CD
cd 1 • 14 titres • 56:53 min
- 1Beetlebum
- 2Song 2
- 3Country Sad Ballad Man
- 4M.O.R.
- 5On Your Own
- 6Theme From Retro
- 7You're So Great
- 8Death Of A Party
- 9Chinese Bombs
- 10I'm Just A Killer For Your Love
- 11Look Inside America
- 12Strange News From Another Star
- 13Movin' On
- 14Essex Dogs
informations
Produit par Stephen Street à Grettisgat, Reykjavík (Islande) et Mayfair, Londres.
line up
Damon Albarn, Graham Coxon, Alex James, Dave Rowntree
chronique
- post-britpop
Album innotable, preuve manifeste de l’incapacité des notes à rendre compte de la valeur d’une œuvre. Qu’est ce qu’on note, une moyenne de qualité, un feeling global d’une heure d’écoute, ou bien les frissons ressentis à un moment particulier, lui-même contenu dans un ensemble qui peut par ailleurs être fade et terne le reste du temps ?? Si je m’en tiens à sa doublette d’ouverture, cet album mérite 6. Surtout Beetlebum, sa mélodie caramel amer, chanson d’allumeuse (et sur une allumeuse ?), donc obscène et maniérée tout à la fois, où tout semble indolent et sensuel le temps de 4 minutes stellaires, des gaytares du binocleux Coxon aux feulements éraillés du Damon de minuit qui a surtout l’air mal réveillé, en passant par les « ouhaouhouh ». Progression harmonique kaleidoscopique pour album fuyant, souvent ennuyeux et mal attifé, mal embouché. Mais Beetlebum n’était-elle pas dans son concept-même une chanson sur les promesses impossibles à tenir, sur une sorte de rêve de libération totalement hors de portée, ce que racontent peut-être ces ad-libs le regard perdu dans l’horizon, les yeux comme plissés pour fixer le soleil d’un pays forcément lointain, forcément autre... Tout sauf l’angleterre. Un baume à l’âme, très John Lennon période marijuana (65-66) dans l’esprit, un Beatles-Baume !
Impossible à écouter pour votre serviteur sans sentir des frissons dans l’échine, ce morceau est associé à vie à un certain voyage scolaire de 2nde jusqu’aux tréfonds de mes synapses, aux rêves d’échappatoires de l’adolescence ingrate, à la tension proto-sexuelle latente dans tout groupe à peu près exactement mixte d’un âge donné (et célibataire… Faites pareil avec des vieux, ça marche), et aux multiples fantasmes et hantises qui découlent de l’inexpérience et du monde bombardé d’informations et d’excitants qu’était déjà le notre en ce tournant de millénaire. On peut dire ce qu’on veut de Blur, des défauts ils en ont, mais aucun artiste, pas même Nirvana, Jeff Buckley, PJ Harvey ou whatever-the-fuck n’a jamais eu le début d’idée de concevoir un morceau exprimant de façon aussi rageuse, maladroite, suintante et pourtant sensuelle la sensation d’être ancré dans un corps, coincé dans un lieu, aux prises avec un moment pénible, se débattant au ralenti, aspirant à une délivrance toute fictive, toute faite de guitares simples et ébouriffées, et cette fausse montée finale qui n’en finit pas, qui parle déjà le langage universel et reptilien, tactile, de Ok Computer. La brêche trouvée, l’échappée.
Et c’est aussi le sens de cette pochette, je crois, surtout dans la chronologie de Blur, après un The Great Escape qui fait lui-même suite à des albums sur une forme de sensation de piège, d’enfermement sociétal. Cette pochette semble évoquer le passage rapide, le mouvement insaisissable des modes et du temps qui accélère dans ce sprint final pré-millenium qu’étaient la fin des années 90. Oui, TOUT sauf l’Angleterre, tout sauf la Britpop (et son rêve trop immobiliste), et au fond, tout sauf la Pop. Alors que Blur s’était fait (re)connaître comme « un groupe de pop », à la fois par les rockistes désireux de les rabaisser et par les esthètes pour qui il s’agissait de Pop au sens noble, au sens de musique en prise avec les vraies sensations et désirs immédiats de la vraie vie. Le quiproquo était total, et Blur, ici, tente de semer jusqu’à cette étiquette, pourtant assez pratique car floue (arf), de « Pop ». Dans quel but ? En pure perte, serait-on tentés de répondre. Mais aussi parce qu’après 3 albums ayant bien marché, les 4 marioles savaient très bien que quoi qu’ils fassent, il y aurait clips, tournée, argent, adoubement des médias etc... La facilité. La complaisance, ingrédient non négligeable dans la saveur de ces années-là. La prétention arty, ici à son maximum. Mission accomplie : Blur n’était plus un groupe de pop, mais le monde continuait à les trouver cools. Pour ce qui est de la musique en soi, en revanche, il est frappant de constater à quel point le premier Gorillaz, censé être situationniste, toc, ironique, foutraque, expérimental au sens hasardeux, oblique, one-shot, escapiste, exercice de style, inauthentique etc... Sonne mieux composé et pensé que cet album épo de Blur. Bien sûr, Gorillaz avait tout une équipe aux manettes, des invités etc. Mais il est bien évident que Gorillaz a été pensé comme un truc qui tient au corps, et que cet album-là de Blur a volontairement été bâclé pour laisser l’auditeur sur sa faim, et si possible frustrer au maximum celui qui serait encore tenté de compter les points face à Oasis. Autant essayer de départager un match entre Hulk Hogan et une tempête de poussière.
Et puis, y’a Song 2. Autre raison pour être stupidement attaché à cet album. Mais j’en parlerai dans la chro du single. Et Country Sad. Le reste ? Pas la même alchimie. Ils n’essaient même pas. Albarn semble avoir été durablement dégoûté de la célébrité maximum suite à l’hystérie des médias sur le beef Oasis/Blur - avec Liam Gallagher déclarant qu’il souhaitait à Damon Albarn de mourir du Sida...( Ah l’éternelle camaraderie des rosbeef, peuple uni s’il en est). Ironiquement, le mollement glauque Death Of A Party ici présent, dont le titre semble évoquer l’euphorie tournée aigre de la Britpop, était une chanson de 92 plutôt sombre évoquant les ados mourant du Sida, ressuscitée pour l’occasion. Raide et 1er degré, You’re So Great montre un Graham Coxon face à l’ingratitude de la sobriété post-delirium tremens, une ambiance au diapason du Look Inside America, où Albarn continue sur sa lancée tragicomique des End Of The Century et The Universal, en plus réchauffé. L’ambiance en demi-teinte donne parfois des moments de grâce nocturne assez sublimes, instantanés froissés au fond d’une poche, ces Strange New From Another Star (écrit avec le petit Bowie illustré sur les genoux, ce qui est une idée pas assez répandue à mon avis) et surtout Country Sad Ballad Man, splendeur résignée et dépressive où Albarn inaugure ses jappements simiesques tandis que Graham Coxon est très occupé à être génial dans son coin, en mode Keith Levene de compagnie. C’est encore lui qui sauve I’m Just a Killer for Your Love de la gouttière avec sa montée-descente... Bref, il y a à picorer un peu partout, mais rien ne rassasie autant que cette triplette d’ouverture. Tout est fort agréable, grâce à cette production crade mais jamais vraiment rêche, ce grain sonore qui leur va aussi bien que la barbe de 3 jours à Daaamoooon, mais ça manque bien cruellement de songwriting. Beaucoup d’exercices de style aussi, jamais trop poussés, un peu de Sonic Youth période 94 sur Movin On, pas mal de poses à la Beastie Boys (les clips), du clavier déphasé, du trip-hop désossé, trop de titres, trop de chansons qui n'en sont pas, beaucoup trop de mégaphone sur la voix pour faire comme chez Guided By Voices. Mais c’était l’époque pré-internet, où la moindre chanson moyenne d’un groupe célèbre, pour peu qu'elle soit biscornue, pouvait ouvrir des fenêtres sur des mondes inconnus. Pas comme Be Here Now, autre œuvre attachante dans son ratage à mon avis. Bouh, allez, on aère ici ça sent le fauve !
Dans le même esprit, dariev stands vous recommande...

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- Alfred le Pingouin › Envoyez un message privé àAlfred le Pingouin
Il est vraiment attachant dans ses défauts, ouais. Je crois que le texte de Beetlebum se réfère plutôt à la drogue, Albarn et sa copine de l'époque étaient accro à je-sais-plus quelle merde à ce moment-là.
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- Lord Tom › Envoyez un message privé àLord Tom
Jolie chro. Inégal mais homogène, les 2 premiers titres évidemment et Death of a party quand même, qui intègre certains sons ricains lofi slacker (hip-hop aussi certes) ... En les rendant mieux lol. Death of a party raccord avec la pochette qui emporte les 90 sur sa civière. Il me semble que Essex dogs était une instruc cool aussi. 13 est plus abouti, celui là dégage pourtant un truc fort en étant mood jaunâtre et flou
- GrahamBondSwing › Envoyez un message privé àGrahamBondSwing
Ecouté en lisant la chronique de Song 2 et d'un Hüsker Dü. Un album important pour Blur, celui où ils arrêtent d'être les bons élèves de la Britpop. Bon, je ferai mieux de lire Dariev qui doit expliquer ça de bien belle manière.
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- Nicko › Envoyez un message privé àNicko
De bonnes idées mais inégal. Je lui préfère "The great escape" largement !
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