Tout n’est pas si aseptisé de nos jours, le monde demeure passionnant de par les multiples petites différences que l’on décèle dans les différentes cultures artistiques. Si la scène sombre sud-américaine nous délivre régulièrement nombre de formations deathrock/batcave/goth rock très intéressantes, pour ce que j’en connais, j’ai pu constater que l’influence de la new wave 80’s avec des groupes comme Ultravox, Paralisis Permanente ou des éléments plus locaux comme Soda Stereo demeure importante. Maintenant que j’apprends l’espagnol, je réalise à quel point cette langue est complexe à utiliser pour des textes rock car proche du français, avec des terminaisons moins voyelles, contrairement à l’italien. C’est pourquoi des combos tels que Caifanes, Heroes del Silencio, Soda Stereo, Baron Rojo ont posé un style de chant, des harmonies musicales s’y accordant pas toujours du goût des oreilles francophiles ou anglophiles (à tort !). Sensibilité personnelle ? J’ ai ressenti beaucoup de ça à l’écoute du premier essai des Chiliens de Maletas Vacias, un mélange d’influences anciennes et modernes, hispaniques et européennes. Le groupe s’inspire des formations de rock sombre mentionnés, ajoutant une touche de new wave de par l’apport du synthé mais également une note plus intense au travers du jeu de basse et parfois de guitare évoquant des échos de deathrock ou du moins de post punk goth 80’s. Voilà qui laisse un champ d’expression vaste à Maletas Vacias qui ne se limitent pas aux clichés attendus. Ainsi, si ‘Desalentador’ ou ‘Boveda azul’ raviront les fans de deathrock, une chanson telle que ‘La Llave’ évoquera davantage les années 80 de par un jeu de basse et de guitare funky et froid mais cela ne suffirait pourtant pas à définir les contours de cette musique qui semble s’amuser à mélanger et brouiller ces références, y compris dans le même morceau. Si le synthé sonne plus léger, les autres instruments alourdiront l’atmosphère; de même que c’est le clavier qui assombrit le tableau quand les cordes se font plus légères. Celles et ceux qui attendraient un disque trop calibré risquent d’être surpris/es, surtout quand la frappe évoque brièvement des cendres de hard rock ou de punk. Le chant pourra aussi déstabiliser, non qu’il soit mauvais, bien au contraire, mais il sonne posé, habité, comme il pouvait l’être chez Litfiba, Heroes del Silencio ou Caifanes, donc pas de clone de Eldritch ni de décadence désespérée à la Rozz Williams. Voilà qui est très bien pour affirmer l’identité d’un combo qui a de la suite dans les idées et un sens aiguisé de la mélodie. Rien d’étonnant, nous n'avons pas affaire à des amateurs puisque le chanteur et clavier n’est autre que le bassiste et vocaliste des excellents Delirium Mask. Un premier essai riche, différent et rafraîchissant.