‘État d'être bien agencé, habile et harmonieux dans l'ajustement des parties’… Oui, le titre sied merveilleusement à cet opus de Tam Quam Tabula Rasa… S’il existait une lisière entre le ciel et les ruines industrielles, cet opus pourrait en symboliser la musique. Imaginez une zone en friches, le décor traditionnel, les grues rouillées, les usines en ruines, les silhouettes tordues de structures métalliques déformées par le temps et la corrosion… Visualisez-les comme des créatures effectuant un ballet sous une nuit claire baignée de lune. Songez à ces immenses silhouettes rampant au ralenti, étirant doucement leurs membres grinçants en des gestes qu’elles veulent harmonieux, en des mouvements qu’elles tentent de rendre gracieux. Imaginez la beauté et le silence nocturnes emplis de ces froissements métalliques presque doux, concevez-les comme des voix tournant leurs étranges mélopées vers l’espace infini. De ce théâtre de ruines rongées, c’est une forme de beauté qui s’élève, une manière d’unir le mortel à l’infini, l’humain à l’éternité. Les Italiens y parviennent en dosant à merveille des sonorités rêches mais jamais agressives qui fusionnent avec des tentations éthérées pour une forme de dark ambient à la fois intimiste et ouvert sur le cosmos. Il y a quelque chose de très enveloppant et rassurant dans ces nappes épurées comme si l’esprit des siècles ouvriers enfin apaisé et libéré du joug du travail pouvait transcender son propre déclin pour nous transmettre un message de paix (‘Allus Dolor’). Une oeuvre accessible et profonde à la fois constituée de nombreuses pistes mais comme aucune d’entre elles n’est excessive dans la durée, le disque s’écoute de manière fluide sans impression de longueur. A écouter dehors la nuit.