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Bryan Ferry › Boys and Girls

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Aladdin_Sane      samedi 15 mars 2025 - 14:15
Fabb74      dimanche 9 mars 2025 - 23:39
vigilante      dimanche 9 mars 2025 - 08:40
Raven      dimanche 9 mars 2025 - 02:19
Horn Abboth      lundi 10 mars 2025 - 15:01

cd • 9 titres • 38:31 min

  • 1Sensation
  • 2Slave To Love
  • 3Don't Stop The Dance
  • 4A Waste Land
  • 5Windswept
  • 6The Chosen One
  • 7Valentine
  • 8Stone Woman
  • 9Boys And Girls

informations

line up

Bryan Ferry (guitare, chant, claviers, percussions)

Musiciens additionnels : David Gilmour (guitare sur "Windswept" et "Stone Woman"), Mark Knopfler (guitare sur "Valentine"), Tony Levin (basse sur "Slave to Love"), Jim Maelen (percussions), Martin McCarrick (violoncelle), Marcus Miller (basse sur "Don't Stop the Dance"), Andy Newmark (batterie), Nile Rodgers (guitare sur "Sensation" et "Don't Stop the Dance"), Jon Carin (claviers), Guy Fletcher (claviers sur "Slave to Love"), Chester Kamen (guitares), Neil Hubbard (guitare sur "Slave to Love"), Keith Scott (guitare sur "Slave to Love"), Neil Jason (basse), Alan Spenner (basse), Omar Hakim (batterie), David Sanborn (saxophone), Anne Stephenson (cordes), Virginia Hewes, Ednah Holt, Fonzi Thornton, Ruby Turner, Alfa Anderson, Michelle Cobbs, Yanick Etienne, Colleen Fitz-Charles, Lisa Fitz-Charles, Simone Fitz-Charles (chœurs)

chronique

"Garçons et Filles"... Le programme a fait ses preuves. Boys and Girls aussi, de la nappe aux draps. L'album d'un Bryan Ferry revenu solo après une série d'albums majoritairement constitués de reprises, pour prolonger les ambiances de l'ultime Roxy Music. Un Ferry qui laisse de côté sa dylanophilie maniaque, au profit d'une entreprise de séduction outreclassieuse, avec une production à faire passer le mètre-étalon Avalon même pour une démo ! Car oui : si Boys and Girls est bel et bien dans la continuité directe de ce dernier, il lui est un cran supérieur en terme de peaufinage, en portant encore plus loin son raffinement velouté, son envoûtement soyeux, sa richesse sonore incognito... Trop crémeux pour être vrai. Grâce à des compositions à faire honte aux plus grands fleuristes, mais surtout grâce à un écrin instrumental grand luxe, qui sent bon le pognon bien claqué.

De la variété ? En effet. Mais de la variété hantée. Comme une call girl cannée enduite d'or fin à la Goldfinger, comme un monde secret, où le vulgaire du maquillage se confond avec les pierres précieuses... Une production fastueuse, truffée de détails d'orfèvrerie totalement "années quatre-vingt", mais versant ultra-ultra-raffiné : la basse slapée claquant des fessiers de déesses, les synthétiseurs plus fondants que la plus indécente pana cotta imaginable, l'inévitable saxophone de porno chic (sublime sur la tragique "Windswept"), des petits sons ou trames saveur "musique du monde" donnant cette fine fragrance voyageuse, autant que profondément onirique, comme ces zones ambient servant d'entractes étranges. On est entre le film romantique, érotique, fantastique... et le film noir un peu aussi, on ne refait pas le vieux garçon. Ferry opère en maître de son style ici. Il n'y a plus rien à toucher. Qu'à ressentir.

Boys and Girls incarne avec Bête Noire le suprême du bellâtre ambigu, au top de ses mélopées de crooner millionnaire arrivé au sommet - et n'y rencontrant qu'une solitude absolue. Un monde des opposés qui s'attirent, du spleen en sapes hors-de-prix et de la damnation des idoles, qui le hante depuis son adolescence de petit prolétaire anglais désireux de palper l'Olympe. À ce stade, Bryan manie le poison diaphane qu'est son chant avec la plus retorse des subtilités. Un chant à la fois passionné et comme détaché, presque étranger à son fantasme.

Fantasme d'un Ferry jamais plus troublant qu'à son apogée, d'un chanteur d'une extrême ambivalence, sa voix-fantôme nous glissant entre les doigts des oreilles... Sa paresse sensuelle est savamment entretenue, et son charme tient dans cette sorte d'intense absence, qu'il cultive avec la maestria des plus grands narcissiques : ceux qui parviennent à faire croire en un naturel qui leur est totalement étranger. Ce doux ensorceleur nous rappelle que les mecs trop bien coiffés peuvent être dangereux. Ses hululements androgynes, qui peuvent passer pour de simples soupirs, portent en eux des chutes de reins et d'empires.

On touche ici au fin du fin du 007 glamouze, sous toutes ses coutures. Initiales Boy Friend. Bryan Ferry déploie une musique si bien apprêtée, au soyeux si maniaque, qu'elle crée dans ses moments les plus troublants ce sentiment singulier : le malaise confortable. Dans les ténèbres, en pastel mauve fuchsia. Ou quelque chose comme ça. Là-bas, dans les Limbes des si conspuées puis si fétichisées Eighties. Chaque détail, chaque centimètre d'étoffe a été ausculté avec soin par le crooner, qui compte désormais dans son staff dévoué des ouvriers nommés David Gilmour et Mark Knopfler. Excusez du peu.

Même les trucs un peu de travers qu'on peut éventuellement percevoir ont été décalés exprès : des gens ont été payés pour ça. Le line-up de Bryan a paré cet album comme sa top model favorite. Sa pépite la plus polie. Sa pop est arrivée ici à pleine maturité, après des années à la délester petit à petit de toute aspérité glam-rock. Il serait stupide de limiter cet album à la cocottante "Slave to Love" et ses "nah-nah nah-nah" à la con... mais elle n'est pas dans les moindres moments, comme ce final smooth et spectral saveur Talking Heads dilués dans le Bailey's, où Ferry se contente de réciter le titre de l'album en faisant des "haaaa-aaah, haaa-aaaah". Transcendance sans effort.

Boys and Girls suinte de désir de plaire à de vastes auditoires, mais reste porté par ce spleen profond de l'angoissé Ferry, qui exprime la mort en filigrane dans le strass et les paillettes. Cet album reste aussi pour cela, avec son successeur, le plus magnétique de son auteur. Un summum de sophistication vénéneuse, voluptueuse, au charme vorace sous ses airs de mousseline inoffensive... Rythmes al dente, voix fondente... Boys and Girls impose sa grandeur tranquille. Même pour qui a trop entendu "Don't Stop the Dance" en playlist de lounge bar, il subsiste un mystère, une aura. Les hauts-parleurs mouillent de la membrane, tout est lactation épaisse de mélodies étalées, sophisti-pop atmosphérique aux cadences chaloupées. Beige, mauve, blanc cassé se mêlent en ondulations fantastiques. Bryan Ferry a tellement lubrifié sa pop qu'elle ne s'encombre plus de préliminaires pour nous happer, au fond du salon sans fond de ce chanteur de charme irréel, flirtant autant avec l'hubris que les songes noirs. Épiphanie tiède aux glaces ardentes. La variété selon Bryan, c'est quelque chose, de subtil mais de puissant. Quelque chose d'obsédant, comme rien qu'un millimètre de bretelle de soutien-gorge dépassant de l'échancrure du tailleur BCBG... Quelque chose de presque invisible... et pourtant...

Prenez simplement cette "The Chosen One" atmo-tribale armée de chœurs plus profonds que la Fosse des Mariannes, gorgée de mystère et de flou mystique : un morceau à l'écho ample et à l'aura épique, fondamentalement sensuel. Le diadème tendu à nous, masse crasseuse et ingrate, par un artiste en état de grâce, accoudé au belvédère de sa carrière et contemplant un passé avalé par les brumes. Les va-et-vient du refrain dans lequel la voix lancinante de Bryan se mêle à ses choristes dans une forme de ressac vaguement nauséeux, est un des très grands moments de sa carrière. C'est digne de ce que Talk Talk ont pu faire de plus beau, rien de moins. "Take my spirit and I must follow..."

Boys and Girls est le Bryan Ferry que j'ai le plus fait tourner avec Bête Noire - même si au fond j'ai toujours eu un petit faible pour le second. Je me suis tellement imprégné de cette musique que j'ai l'impression de la porter sur ma peau, comme un parfum... J'ai caressé ses claviers et guitares onéreux qui semblent caper la pièce d'écoute, longé ses rythmiques-rosaces chill-exotica ou carioca-wave, j'ai guinché sur son reggae gay, tâté sa texture moelleuse et ferme en même temps, tel un coussin pop absolu, j'ai examiné (et admiré) la moindre ligne de son jersey impeccable, me suis abandonné dans ses trames d'une affolante fluidité, dans cette variété exigeante émulsionnée en clair-obscur, dans sa vertigineuse tiédeur aux échos d'Ailleurs... alors pardonnez-moi si je deviens lyrique.

Très bon
      
Publiée le dimanche 9 mars 2025

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Aladdin_Sane Envoyez un message privé àAladdin_Sane

Trouvé aujourd'hui chez mon disquaire, pas cher, avec la "Bête noire". Ça sent le stupre...

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Aladdin_Sane Envoyez un message privé àAladdin_Sane

Ha, le débat sur le Yacht Rock. J'ai vu un documentaire à ce sujet il n'y a pas longtemps produit par HBO, très intéressant. Le Yacht Rock c'est un phénomène très américain, californien même, avec des musiciens qui jouent les uns avec/chez les autres (Toto chez Bozz Scaggs, Michael McDonald chez Christopher Cross...) et Steely Dan qui refuse l'étiquette (Donald Fagen qui envoie littéralement chi... l'interviewer téléphonique qui l'appelle à ce sujet). Brian Ferry c'est autre chose, la classe anglaise notamment.

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Raven Envoyez un message privé àRaven
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Non. C'est plus hanté et profond pour moi, même si les tubes ont été énormément passés en cadres lounge dans des palaces, des yachts... Mais il y a des éléments de yacht/soft rock dedans, on va dire, ou en commun avec. L'approche bourgeoise et super blanchie/délavée du funk, entre autres, les musiciens et ingénieurs en surnombre qui travaillent un truc hyper léché, hyper produit... Mais le but principal ici me semble l'émotion, plus que le son : la production la sert, même chiadée à ce point elle n'est pas l'objectif principal... Ferry a toujours sonné nettement plus incarné et moins lisse que du Steely Dan époque Aja/Gaucho par ex, chez moi. Certains utilisent l'étiquette "sophisti-pop", mais comme "art pop" je rechigne à l'employer...

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Horn Abboth Envoyez un message privé àHorn Abboth

Est-ce que c'est du yacht rock ?

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Raven Envoyez un message privé àRaven
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Merci Richard. En espérant qu'il te parlera autant qu'à moi... Et évidemment si la séduction opère : Bête Noire est l'étape suivante indispensable (comment ça je radote ?!) ^^

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