Je possède deux disques de Abu Nein; quand je les écoute les deux à la suite sur mon iPod, je peux dire d’oreille le moment où commence le second. Le style n’a pas spécialement changé mais comme le diable croît dans les détails, il a décidé de s’emparer de cet opus. Dès les premières mesures chantées, le fait sonne aux oreilles. Je reprochais précédemment à Erica Li Lundqvist d’avoir un chant manquant de charisme, la voilà soudain pourvue d’une gravité neuve, subtilement mise en valeur par un travail discret de production; un léger halo de réverbération, un ou deux micro-effets font la différence. De manière générale, le disque sonne plus dynamique, les sonorités sont sélectionnées avec plus d’audace et même la boîte s’avère plus variée dans ses tonalités minimales. Un certain voile de tristesse couvre également ce second volume permettant au groupe d’alterner entre des compositions dansantes plus agressives (limite EBM parfois, ‘Kissing the glove’) et d’autres plus recueillies ('Eternity', 'The tower'). Musicalement, tout en conservant la portée synthétique, l’instrumentalisation s’avère plus riche avec des influences orientales (‘I am emptiness’, ‘Black whistle’), spatiales (‘Eternity’); bien que les sonorités ne soient pas spécialement chaleureuses, elles dégagent une certaine ampleur à défaut de rondeur laissant clairement deviner que la musique de Abu Nein n’est pas la bande-son de questionnements existentiels sur le dancefloor, elle porte une certaine spiritualité en ses lignes. Les mélodies sont excellentes, les Suédois semblent se construire une identité plus proche des collègues de Selofan ou Lebanon Hanover, ce qui leur sied plutôt bien. Cette voix plus profonde, ces sonorités plus mystiques et mystérieuses donnent un corps indéniable à cet album sophomore et il est toujours jouissif de constater les progrès d’un groupe sur un nouvel essai, ce qui est indéniable ici. Les trois années entre les deux disques valaient la peine…