Ca fait mal une guitare qui grince, pas vrai ? On sait d’ailleurs qu’un tel instrument est capable de tuer des fascistes donc mieux vaut ne pas plaisanter avec. Il sert également le propos de Bitter Fruit, formation deathrock dans ce qu’elle a de punk et de brut. Qui plus est le combo a choisi d’enregistrer ce que je crois être son unique LP en live, renforçant ainsi cette impression urgente, tendue avec des guitares parfois aux limites du larsen, une basse qui parait vouloir désherber la jungle avec ses cordes. Qu’on ne s’y trompe pas, le rendu sonore est de bonne qualité et ne gâche en rien le plaisir d’écoute. C’est avec des formations de cet acabit qu’on remarque à quel point le deathrock est le point de jonction du punk rock et du goth. Pour plus de précision, ajoutons que le punk de Bitter Fruit se rapproche carrément de la tradition garage, y compris dans les intonations barrées du chant. C’est rapide sans pied sur le turbo non plus, les guitares couinent dans les tonalités typiques du genre, la basse sombre tapisse, on devine un vocaliste complètement possédé, comme une version horror de Lux Interior (‘Rainbow’, ‘Daydream’, la reprise de Wasp Women) et malgré l’aspect brut de décoffrage, les mélodies ressortent fort bien avec une petite touche batcave ajoutant au plaisir. Très slasher movie américain de série B (ça marche aussi avec les zombies) mais c’est ainsi qu’on les aime, pas vrai, quand ça crie, que ça saigne et que ça fait du bruit.