La Race › Je Me Rapproche de Mon Squelette

La Race invente des sports extrêmes. Escalade Statique. Course de Fond mais Sur Place. Usure Core sur Corde (qu'il faut chercher, il le mugit plus d'un coup – Cherche la corde ! Cherche la PUTAIN d'CORDE !). Peu importent le nom, les variations, les épreuves qui se déclinent – l'essentiel c'est que ce soit, justement, une ÉPREUVE. Et partagée – pour eux trois qui se font mal sur les instruments, s'échangent avec eux les coups comme pour nous. On souffre aussi. On insiste aussi. On est dedans – on s'est encore bien mis dedans. C'est une espèce de Réalité Augmentée, en fait, un disque ou un concert de La Race, pas besoin de casque (se protéger c'est tricher, de toute), pour y accéder. Enfin, augmentée... Ou diminuée, plutôt, resserrée, réduite à l'essentiel – c'est à dire à presque rien, le plus collé possible au Néant. C'est dit dans le titre tiens : on se rapproche de nos squelettes.

Cette fois, c'est une seule plage, de plus d'une demie-heure. La gueulante est plus crue que jamais, les mots toujours aussi bouffés, baragouinés, dégueulés-ravalés-redégueulés. On comprend tout de travers – la polysémie des labiales et palatales rognées. « Heureusement qu'y a les filles » Ou « Heureusement qu'y a les flics » ? En tout cas « Heureusement y'aura pas d'... », juste après. Je crois qu'il dit aussi J'ai la tête qui pend et J'ai la tête qui coule. Et un truc comme Dieu est Grand, puis Dieu les... Avalera Tous ? … CHERCHE LA CORDE ! CHERCHE LA PUTAIN D'CORDE !

Le son est cette fois encore impitoyablement sale et net à la fois – dur et poussiéreux plutôt que friable. Tout nous tape dessus – sourdement et sans fin. C'est toujours épuisant. Ça n'est plus depuis un moment le bordel, le chaos flou des débuts – ils ont en quelque sorte appris à jouer, éliminé les gestes parasites qui faisaient que ça cognait moins direct, estourbissait un peu plus au hasard. Ou alors ils n'ont gardé que ceux-là, allez savoir, en les perfectionnant pour atteindre mieux au pire. La guitare de Pavel fait les sirènes d'usine, les chaînes de montage et l'effondrement des mêmes, encore, à la perfection. Le bruit qui nous harasse. La batterie de même – tambours et ferrailles. On est niqués. On l'a encore une fois dans l'os (oh oh oh...).

Au début de la course, La Race tire un coup de pistolet-starter. La différence c'est qu'avec eux, le boucan persiste, tout du long. Le silence ne tombera que quand vous franchirez la ligne, que vous vous écroulerez derrière. Les oreilles sifflantes et les tendons moulus.