Gojira / Marina Viotti / Victor Le Masne › Mea culpa

Les JO de Paris 2024... En tant que parisien, on en aura entendu parlé de cet événement, ses préparatifs, ses défis, ses choix et sa réalisation (qu'on aura bien vécu aussi !!)... Dès le début, quand ils ont annoncé très rapidement certains choix, beaucoup sont restés sceptiques, que ce soit sur certains lieux d'épreuves éphémères, des plans de transport mais aussi de la cérémonie d'ouverture ! Là où traditionnellement, elle se déroulait dans le stade où allaient se produire les épreuves d'athlétisme, les organisateurs ont annoncé vouloir faire cette cérémonie en partie sur la Seine qui traverse la ville, du pont d'Austerlitz au Champs de Mars devant la Tour Eiffel. Au-delà du tour de force technique et organisationnel, il faut bien avouer que le cadre allait avoir de la gueule. Ce qu'on ne savait pas à l'avance, c'était la liste des artistes qui allaient s'enchaîner tout au long de la soirée, entre les défilés des athlètes (sur des bateaux voguant sur la Seine). Alors que très peu d'informations circulaient à ce sujet, la veille de l'événement, des rumeurs persistantes annonçait la venue du groupe de death metal bordelais Gojira (au milieu de noms comme Lady Gaga, Céline Dion, Philippe Katherine ou Aya Nakamura) alors que le style n'est pas connu pour être particulièrement mainstream, surtout dans le cadre d'un événement suivi par plusieurs milliards de téléspectateurs. Et pourtant... Lors de cette cérémonie, plusieurs artistes ont réalisé chacun à leur tour une performance de quelques minutes sous la forme de tableaux représentant des événements marquants de l'histoire de France avec comme écrin les différents monuments de la capitale bordant la Seine. C'est alors que pour le chapitre "Liberté" au moment d'évoquer la Révolution Française, au niveau de la Conciergerie (lieu de détention de Marie-Antoinette avant son exécution), les quatre musiciens de Gojira sont apparus sur des plateformes devant des fenêtre du bâtiment pour jouer une réinterprétation du chant révolutionnaire "Ah ! Ca ira" en duo avec la cantatrice Marina Viotti (qui a un passé de chanteuse metal notamment au sein de Soulmaker ou de Lost Legacy). Au-delà d'un titre, il s'agit plutôt d'un mouvement durant un peu moins de trois minutes où le chant révolutionnaire a été complètement réadapté pour coller avec le style moderne de Gojira. On est loin du morceau original auquel on aurait ajouté quelques grosses guitares amplifiées et un chant extrême, non, pas du tout, et c'est là où se situe la réussite de ce mouvement. Victor Le Masne, qui a réalisé les arrangements, a complètement intégré la personnalité des musiciens, que ce soit Gojira mais aussi Marina. Il s'agit véritablement de death metal bien moderne tout à fait dans le style de ce que les Bordelais ont l'habitude de jouer. Sur la performance, il faut aussi parler de l'aspect visuel extrêmement important pour comprendre l'impact de ce tableau avec des serpentins rouge sang et l'arrivée de Marina sous les fenêtres de la Conciergerie à bord d'un bateau pour interpréter "L'amour est un oiseau rebelle" issu de l'opéra de Carmen et totalement intégré au thème principal révolutionnaire. Le résultat est visuellement grandiose et impressionnant. Ayant vu la cérémonie d'ouverture à la télé en direct, je suis resté scotché devant cette performance et je ne me souviens pas d'un événement rock/metal aussi visuellement impressionnant que ces 3 minutes. C'est assez dingue de voir le rendu d'une telle performance. C'est là aussi où on peut se rendre compte de l'impact visuel d'un style aussi brutal et puissant que le death metal. Même si je ne suis pas particulièrement friand de ce style trop moderne pour moi joué par Gojira, il faut bien admettre que ça en jette ! D'un point de vue purement musical, je trouve les rythmiques trop groovy mais c'est presque secondaire tant l'événement était ahurissant. J'ai par contre bien plus apprécié la deuxième partie du morceau avec Marina. La structure du mouvement montre en tout cas qu'un opéra en mode death metal, avec chant guttural, peut s'adapter. Il faut en tout cas louer la prise de risque de proposer un style musical aussi extrême pour un événement aussi mondial qu'une cérémonie d'ouverture de Jeux Olympiques. Quelques semaines après l'événement, le Comité International Olympique a la bonne idée de sortir en digital cette performance. Et même s'il manque le côté visuel, le morceau est déjà intéressant, surtout pour étudier le travail d'arrangements des thèmes ainsi que leur articulation entre les différents musiciens. Et pour avoir un replay de la performance en direct, elle est disponible sur toutes les bonnes plateformes visuelles sur le net ! Voilà en tout cas le genre de performance unique que nous ne sommes, à mon avis, pas prêts de revoir !